Page:Michaud - Biographie universelle ancienne et moderne - 1843 - Tome 10.djvu/108

Cette page n’a pas encore été corrigée

fosse le prophète vivant, ordonna qu’on l’en retirât, et qu’on y fit jeter ses accusateurs avec leurs femmes et leurs enfants. Les interprètes de l’Écriture s’accordent à dire que, vers la première année du règne de Darius, Daniel connut, par révélation, que la mort du Messie devait arriver au bout de soixante-dix semaines, composées chacune de sept années, c’est-à-dire, après une période de quatre cent quatre-vingt-dix ans ; que le prophète apprit aussi de l’ange Gabriel la chute de l’empire des Perses après Cyrus, l’érection de l’empire des Grecs, les guerres qui devaient agiter l’Égypte et la Syrie, et plusieurs autres événements. Daniel conserva longtemps, à la cour de Cyrus, son crédit et son autorité ; mais, ayant confondu les prêtres de Bel, dont il fit abattre le temple, et ayant fait mourir un énorme dragon, adoré comme une divinité, en jetant dans sa gueule un gâteau composé de résine, de graisse et de poil, les Babyloniens en révolte, demandèrent et obtinrent que Daniel fut une seconde fois jeté dans la fosse aux lions. Il y demeura six jours. On lit dans la Bible, que le prophète Habacuc, saisi par un ange qui le tenait par les cheveux, et transporté de la Judée vers Babylone, au travers des airs, remit à Daniel les pains qu’il avait fait cuire pour ses moissonneurs. Il est ajouté dans l’Écriture, que, le septième jour, Cyrus s’étant approché de la fosse, pour pleurer la mort de Daniel, le vit assis et paisible au milieu de sept lions ; qu’il le fit retirer de cet autre terrible, et que ses ennemis, y étant précipités, furent dévorés en un moment. C’est tout ce que les livres saints nous apprennent de Daniel. Les auteurs orientaux disent qu’il prêcha la foi de l’unité d’un Dieu dans toute la Chaldée, qu’il convertit Cyrus, et que ce prince lui donna le gouvernement de la Syrie et la possession de la ville de Damas. St. Épiphane, qui a été suivi par la plupart des historiens, croit qu’il ne profita point de la permission donnée par Cyrus à tous les juifs de retourner dans leur patrie ; qu’il fut retenu par les grands emplois qu’il possédait à Babylone, et qu’il mourut dans cette ville à une époque qui est inconnue. Il paraît qu’un grand nombre de juifs de la captivité préférèrent aussi les établissements qu’ils avaient formés sur les bords de l’Euphrate, à ceux qu’ils auraient pu ne pas retrouver dans la Judée, devenue presque une solitude. Quelques auteurs pensent enfin que Daniel revint dans la Judée avec Esdras, mais qu’il retourna en Perse, et qu’il mourut dans la ville de Suse. Benjamin de Tudéle raconte qu’on lui montra le tombeau de Daniel dans cette dernière ville. L’historien Josèphe dit que, de son temps, on voyait encore à Ecbatane une tour d’une structure admirable, qui avait été bâtie par Daniel, et qui servait de sépulture aux rois de Perse et de Média. La sagesse de Daniel était passée en proverbe, même de son vivant. Ézéchiel disait ironiquement au roi de Tyr : « Vous êtes plus sage que Daniel. » Plusieurs docteurs juifs trouvant trop de clarté dans les prophéties de Daniel, lui ont refusé le titre de prophète, que cependant Josèphe ne balance pas à lui accorder. Les rabbins prétendent qu’il ne peut lui être donnée, 1° parce qu’il n’a pas vécu dans la terre sainte, hors de laquelle n’a pu résider l’esprit de prophétie ; 2° parce qu’il a passé sa vie à la cour des rois, au milieu des délices et des honneurs ; 3° parce qu’il devait être eunuque, puisqu’il servait dans le palais de Babylone, et qu’il est dit dans le Deutéronome : Non íntrabit eunuchus Ecclesiam Dei. Il est vrai que Ben-Ezra et beaucoup d’autres rabbins ne croient pas que Daniel fût eunuque, mais ils se contentent de mettre ses écrits au rang des hagiographes, qui ont bien moins d’autorité que les livres canoniques. Porphyre prétendait que les prophéties de Daniel lui étaient faussement attribuées, et qu’elles étaient l’ouvrage d’un imposteur qui vivait en Judée sous le règne d’Antiochus Épiphanes. Mais Daniel est regardé comme vrai prophète dans l’Évangile de St. Matthieu (xxrv-15). Tout ce que Daniel a écrit en hébreu ou en chaldéen a été constamment reconnu pour canonique par les juifs et par les chrétiens ; mais ce qui ne se trouve qu’en grec a soutfert, depuis St. lérôme jusqu’au 16e siècle, de grandes contradictions, et n’a été reçu canonique ment que depuis la décision du concile de Trente. Les douze premiers chapitres de Daniel sont partie en hébreu, partie en chaldéen. Le chapitre 3, depuis le 24° verset jusqu’au 90°, et les’deux derniers chapitres sont en grec. C’est une grande question de savoir s’ils ont jamais été écrits en hébreu. La version grecque que l’on a de tout Daniel est de Théodotion, et depuis longtemps la version des Septante est perdue. On peut consulter les préfaces de St. Jérôme et de D. Calmet sur Daniel. Quelques orientaux attribuent à ce prophète l’invention de la géomance qu’ils appellent Remi. C’est une sorte de divination faite avec des points tracés au hasard sur des lignes inégales. Les mêmes auteurs attribuent au même prophète un livre intitulé : Principes de Feœpli cation des songes. On conserve à la bibliothèque nationale un ouvrage qui a pour titre : Odmath al-mantoul du Daniel al-Nabí, et qui contient de prétendues prédictions qui ont été fabriquées par les mahométans. Quelques auteurs

croient, mais sans preuves, qu’il a existé deux Daniels, l’un de la tribu de Juda, l’autre de la tribu de Lévi. Ils attribuent à ce dernier ce qui concerne Suzanne, la destruction du temple de Bel, et la mort du dragon. V-vs.


DANIEL (Pu-mns), : né à Drléans en 1530, d’une famille citée pour son attachement au catholicisme, après avoir étudié dans l’université de cette ville, s’y distingue. tellement comme avocat, que, malgré la différence d’opinion, le cardinal Odet de Châtillon le choisit pour bailli de son abbaye de St-Benoît sur Loire. Pendant les troubles religieux, Daniel ne se plaignit point quand, en 1562, e cardinal lit enlever par Aventin, son intendant, l’or- et l’arfi gent qui couvraient les chasses» de St. Benoit, et qu’on déposa dans le château de l’lsle, où le bailli d’Orléans faisait battre monnaie au profit du prince