Page:Michaud - Biographie universelle ancienne et moderne - 1843 - Tome 1.djvu/724

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
708
ANG

manda un crucifix de marbre pour la Sorbonne. Il avait toujours été pieux, et dit, en l’exécutant, « qu’il ne pouvait terminer sa carrière par un morceau plus analogue à ses sentiments. » Il fit présent, en mourant, à l’église de St-Roch, sa paroisse, d’un Christ en bois, qui fut ensuite placé dans la chapelle du Calvaire de cette église. Michel Anguier mourut le 11 juillet 1686, à 74 ans, et fut enterré à St-Roch, près de son frère aîné. On leur fit une épitaphe en huit vers français, trop médiocres pour être rapportés. Cet artiste est au nombre des bons sculpteurs du siècle de Louis XIV. Son goût de dessin est celui que Lebrun avait mis en vogue, c’est-à-dire qu’on y trouve presque toujours de la correction, mais que souvent aussi on y désire désirerait plus d’élégance. D-t.


ANGUILLARA (Giovanni Andrea Dell’), l’un des plus célèbres poètes italiens du 16e siècle, naquit vers l’an 1517 à Sutri, en Toscane, de parents pauvres et d’une basse condition. Après avoir fait des études aussi bonnes que sa fortune le lui permettait, il se rendit à Rome, où il se mit correcteur d’épreuves chez un libraire. Une liaison secrète avec la femme de ce libraire, découverte par le mari, obligea l’Anguillara de quitter Rome ; il emportait avec lui quelque argent et quelques hardes, lorsqu’il rencontra des voleurs qui lui enlevèrent ces fruits de son travail. Il arriva à Venise dans l’équipage d’un mendiant ; mais il trouva promptement de l’emploi chez le libraire Franceschi. C’est là qu’il fit, pour un prix très-modique, sa traduction des Métamorphoses d’Ovide, en vers italiens, et qu’il composa plusieurs autres ouvrages. Il retourna ensuite à Rome, où sa réputation poétique était parvenue ; mais son malheur l’y suivit, et après avoir vendu, pour vivre, ses habits, ses livres, tout ce qu’il possédait, il mourut de besoin, et d’une maladie, fruit de son inconduite, dans une auberge auprès de Torre di Nona. On ne sait rien de positif sur l’époque de sa mort ; on voit seulement, par une lettre d’Annibal Caro, qui lui est adressée, qu’il vivait encore en avril 1564. Sa traduction des Métamorphoses en ottava rima a joui et jouit encore en Italie d’une grande réputation. Les critiques les plus célèbres, et entre autres Varchi, l’ont mise au-dessus même du poëme original. Ces éloges sont exagérés ; mais l’auteur en mérite beaucoup, pour la facilité, pour l’élégance et la poésie de style : il est vrai que c’est plutôt une imitation libre qu’une traduction exacte. Il s’écarte à chaque instant de son texte ; il en retranche, il y ajoute ce qui lui plait. Par exemple, au lieu de rendre par des expressions opposées l’une a l’autre, mais qui ont de la justesse et une sorte de gravité, la masse informe du chaos avant la création de l’univers, comme l’a fait en général Ovide dans ce morceau, il fait jouer ensemble, dans tous les vers d’une octave, comme Ovide dans deux des siens, le ciel, la mer, la terre et le feu, à peu près de cette manière : « Avant qu’existassent le ciel, la mer, la terre et le feu, déjà existaient le feu, la terre, le ciel et la mer ; mais la mer déformait le ciel, la terre et le feu ; le feu rendait difforme le ciel, la terre et la mer ; car, là où étaient la terre, et le ciel, et la mer, et le feu, là étaient aussi le ciel, et la terre, et le feu, et la mer ; le terre, le feu et la mer étaient dans le ciel, et le ciel était dans la mer, dans le feu et dans la terre. » C’est là un jeu d’esprit puéril, et un cliquetis de mots et d’idées beaucoup trop prolongé ; mais il s’en faut bien que tout le poëme soit écrit ainsi ; la lecture en est généralement agréable ; aussi en a-t-on fait un grand nombre d’éditions. La première, qui ne contenait que les trois premiers livres, fut faite à Paris, 1554, in-4o, et dédiée au roi Henri II. On en fit une complète à Venise en 1561, in-4o, que le libraire dédia au roi de France Charles IX ; mais le nom de Henri II est constamment resté dans la seconde octave du poëme, que l’auteur eut toujours l’intention de lui dédier en entier. La meilleure et la plus belle édition est celle des Giunti, Venise, 1584, in-4o, avec les figures de Jacopo Franco, les remarques d’Orologi, les arguments et les petites notes en marge de Turchi. Elle a été réimprimée, par les mêmes, en 1592. L’Anguillara avait aussi commencé une traduction semblable de l’Énéide. Le premier livre fut imprimé à Padoue en 1564, in-4o ; mais l’ouvrage en resta là, soit par la mort de l’auteur, soit par tout autre motif. On a encore de lui : 1° Edipo, tragédie en vers libres, Padoue, 1556, in-4o, et Venise, 1565, in-8o. Ce n’est pas une simple traduction de l’Œdipe roi de Sophocle. L’auteur y introduisit des épisodes, et y fit des additions, qui divisent l’intérêt et altèrent la simplicité du sujet. Elle fut cependant représentée, avec beaucoup de magnificence et de succès, à Vicence, et ce fut pour cette représentation que le célèbre architecte Palladio éleva, en 1565, un superbe théâtre. 2° Quelques odes, ou canzoni, adressés aux ducs de Florence et de Ferrare. 3° Des arguments en ottava rima, pour tous les chants du Roland furieux de l’Arioste. Le Tasse écrit, dans une de ses lettres, que l’Anguillara vendait cinq jules au libraire chacun de ces arguments. 4° Quatre Capitoli ou satires dans le genre burlesque, imprimées dans plusieurs recueils de pièces de ce genre ; elles sont estimées, la dernière surtout, qui est adressée au cardinal de Trente, et dans laquelle l’auteur parle fort longuement de lui-même sans ennuyer, et trouve le moyen d’être piquant et gai, même en exposant sa misère. G-é.


ANGUILLARA (Louis, ou Armand), médecin, savant botaniste italien, né vers le commencement du 16e siècle, à Anguillara, petite ville de l’État ecclésiastique, d’où il a pris son nom. La réputation qu’il s’était acquise par ses voyages lui mérita de la part de la république de Venise le titre de simplicista, ou de son botaniste en chef, et la place de directeur du jardin de botanique de Padoue. Il fut le troisième qui la remplit depuis la fondation de ce jardin, en 1540. Il remplaça Mundella, qui se nommait comme lui Aloysio, ce qui a occasionne quelques méprises, et il fut remplace par Guilandin, lorsqu’en 1561 il quitta cette place, dégoûté par les tracasseries qu’on lui suscita, pour se retirer à Ferrare, où il mourut en 1570. On a peu de détails sur sa vie privée. Voici ceux qu’on a pu tirer du