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ABE

    Patience, vertu, constance ?
Peut-être en saurez-vous un jour la différence ;
Apprenez cependant comme on parle a Paris :
    Votre longue persévérance
    À nous donner de mauvais vers,
    C’est ce qu’on appelle constance
    Et, dans ceux qui les ont soufferts,
    Cela s’appelle patience.

L’abbé Abeille avait aussi composé deux opéras, Hésione et Ariane ; ces ouvrages, que Quinault aurait pu lui envier, si l’on en croit M. de Sacy, n’ont pas vu le jour. Il a eu part à la traduction de Justin par Ferrière, dont la 1re édition est de 1693. Son discours de réception a l’Académie française, 1704, est sagement écrit ; on peut le ranger parmi les meilleurs du genre, bien qu’il soit dépourvu d’élévation et de traits brillants. Son successeur à l’Académie, l’abbé Mongault, a fait son éloge. On le trouve aussi dans le tome 5 de l’Histoire des membres de l’Académie française par d’Alembert. Cet écrivain y rapporte contre Abeille une autre épigramme, attribuée à Racine, et qui parait être de Faydit. Le style de l’abbé Abeille est presque toujours lâche et languissant. Tous ses ouvrages de circonstance se trouvent dans les recueils de l’Académie française. A-B-t.


ABEILLE (Scipion), frère du précédent, né dans la même ville, cultiva la poésie avec quelque succès, mais il dirigea principalement ses études vers l’art de guérir. Il fit deux campagnes en Allemagne, en qualité de chirurgien-major du régiment de Picardie, et mourut à Paris le 9 décembre 1691. On a de lui des ouvrages aujourd’hui peu dignes d’attention. 1° Histoire nouvelle des os, selon les anciens et les modernes, enrichie de vers, 1683, in-12 ; 2° Anatomie de la tête et de ses parties, 1689 et 1696, in-12 ; 3° Chapitre singulier lire de Guidon, 1689 et 1695, in-12 ; 4° Traité des plaies d’arquebuse, 1695, in-12 ; 5° le Parfait Chirurgien d’armée, 1696. À la suite de ce dernier on trouve les trois ouvrages précédents. — Abeille, son fils, embrassa la profession de comédien, et l’exerça en province, où il est mort. Il donna, en 1712, le Fille Valet, comédie en trois actes et entiers, non imprimée, et qui eut sept représentations ; on attribue aussi cette pièce a l’abbé Gaspard Abeille, son oncle. Il avait composé une petite comédie intitulée : Crispin jaloux, qui n’a pas été représentée. A-B-t.


ABEILLE (Louis-Paul), né à Toulon, le 2 juin 1719, fut membre de la Société d’agriculture de Paris, et successivement inspecteur général des manufactures de France et secrétaire général du conseil du bureaux du commerce. Il mourut à Paris, le 28 juillet 1807. On a de lui : 1° Corps d’observations de la Société d’agriculture, de commerce et des arts, établie par les états de Bretagne, Rennes, 1760 et 1762, 2 vol in-8o et in-12 ; 2° Principes sur la liberté du commerce des grains, 1768, in-8o. Il a eu part, avec quelques-uns de ses confrères, à la rédaction des Observations de la Société d’agriculture de Paris, sur l’uniformité des poids et mesures, 1790, in-8o, etc. ; et a été éditeur des Observations de Malesherbes sur l’Histoire naturelle de Buffon, 1796, 2 vol. in-8o et in-4o.[1]. A-B-t.


ABEL, 2° fils d’Adam, était, selon l’opinion commune, et d’après l’historien Josèphe, frère jumeau de Caïn. Plusieurs le font naître un an après son frère, c’est-à-dire la 2e année du monde ; d’autres lui donnent quinze ans, et quelques-uns enfin trente ans de moins. Caïn était laboureur, et Abel se livrait à la vie pastorale. Tous deux offraient des présents au Seigneur : Caïn, les premiers de ses fruits ; et Abel, les premiers nés de son troupeau. Dieu témoigna qu’il agréait les offrandes d’Abel, et qu’il rejetait celles de son frère. Celui-ci, consumé d’envie, invita Abel à sortir, et le tua au milieu des champs. Le sang innocent de ce juste cria vers le ciel, et le Seigneur demanda à Caïn ce qu’était devenu Abel. Il répondit : « Suis-je le gardien de mon frère ? » L’Église cite souvent le sacrifice d’Ahel comme le modèle d’un sacrifice saint, pur, désintéressé ; c’est particulièrement dans le Canon de la messe : Sicut accepta habere dignalus es munera pueri tui justi Abel. Plusieurs Pères de l’Église ont cru qu’Abel était mort sans avoir été marié ; et c’est sans doute cette opinion qui a donné lieu à une secte d’hérétiques qui s’éleva aux environs d’Hippone en Afrique, sous les règnes d’Arcadius et d’Honorius, et qui prit, du nom d’Abel, celui d’Abélites ou d’Abélonites. Cette hérésie consistait a condamner l’usage du mariage. Au rapport de quelques voyageurs, on montre, à 16 milles de Damas, un tombeau que l’on dit être celui d’Abel ; et St. Jérôme assure que, de son temps, la tradition constante des Hébreux était qu’Abel avait été tué dans la contrée qui environne Damas. Mais on sait quel est le goût des peuples de l’Orient pour les monuments qui semblent les reporter jusqu’aux premiers temps du monde. Ce que nous savons de plus positif au sujet d’Abel, c’est que sa mémoire a toujours été en grande vénération. St. Paul dit de ce patriarche que son sang parle encore après sa mort. Jésus-Christ lui-même le qualifie du nom de Juste ; et son sacrifice est loué dans l’Église comme ceux de Melchisedech et d’Abraham. Tout le monde connait la Mort d’Abel, poëme par Gessner. Legouvé a donné sur ce même sujet une tragédie en trois actes. C-T.


ABEL, roi de Danemark, 2° fils de Waldemar II, eut en partage le duché de Sleswick ou le Jutland méridional ; mais le trône étant échu, en 1241, à Éric, son frère aîné, l’ambition divisa bientôt ces deux princes. Abel fit une étroite alliance avec Adolphe de Holstein, dont il avait épousé la fille, nommée Mechtilde. Se voyant appuyé, il déclara la guerre à son frère, et soutint ses autres frères dans leur rébellion contre Éric. Ce monarque, successivement vainqueur de tous ses rivaux, força Abel à demander la paix et a se reconnaître son vassal. Peu après, en 1250, les comtes de Holstein ayant refusé de restituer à la couronne la ville de Rend-

  1. On trouve, dans le t. 2 des Histoire de la Société d’agriculture du département de la Seine, une notice biographique sur Abeille, par M. Silvestre. (Note de l’éditeur)