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de son ancienne patrie ; ce qui donna naissance à la ville de Tauromène, qui fut fondé l’an 395 avant J.-C. Il parait qu’il s’y maintint dans l’indépendance ; car, lorsque Timoléon vint pour délivrer la Sicile du joug du tyran. Denys le Jeune, l’an 343 avant J.-C., Andromachus le reçut dans sa ville, et engagea ses concitoyens à se réunir aux Corinthiens, pour affranchir la Sicile. Timée l’historien était son fils. C-r.


ANDROMACHUS, premier médecine de Néron naquit dans l’île de Crète, et se rendit fameux par le médicament appelé thériaque, dont il est l’inventeur. On ne sait rien de ses principes et de sa méthode en médecine, et on n’a de lui qu’un recueil de médicaments composés, la plupart de son invention ; Galien le loue sous ce rapport. C’est dans un poëme en vers élégiaques, intitulé : Γαλήνη (calme, tranquillité), dédié à Néron, qu’il donne le secret de la composition de sa fameuse thériaque, θηρίον, ὠκας (remède contre les poisons). Jusqu’à lui, on n’usait que de l’antidote de Mithridate, dont la thériaque, du reste, ne diffère que par l’addition de vipères. Les empereurs romains attachaient une grande importance à la préparation de ce médicament, composé de soixante substances, et ils le faisaient fabriquer dans leur palais. De nos jours, en certains pays, cette préparation est très-simplifiée ; à Berlin, par exemple, ce n’est plus qu’un composé de quatre substances, dont l’opium est la base. le poëme d’Andromachus nous a été conservé par Galien, dans son traité de la thériaque, adressé à Pison. Galien observe qu’Andromachus avait écrit cette formule en vers, pour qu’elle fût moins sujette à être altérée par les copistes. Moïse Charas en a publié, en 1668, in-12, une traduction. Andromachus introduisit un usage inconnu avant lui, en prenant le titre d’archiater ou premier médecin, des empereurs. — Son fils, nommé Andromachus comme lui, fut aussi archiater de Néron, et il laissa sur la médecine un grand nombre d’écrits que le temps n’a point respectés. C. et A-n.


ANDRONIC Ier (Comnène), empereur de Constantinople, né l’an 1110, était petit-fils, par son père Isaac, d’Alexis Comnène. Il parvint par son audace, sa souplesse et son éloquence insinuante, à captiver la faveur de l’empereur Manuel Comnène, son cousin. Celui-ci vivait publiquement avec sa nièce Théodora, dont la sœur, la jeune Eudoxie, franchissait pour Andronic toutes les bornes de la pudeur et de la décence publique ; elle le suivait à l’armée, et partageait ses fatigues, ses débauches et ses dangers. Or commerce scandaleux, plusieurs attentats contre la personne même de l’empereur, et enfin les intelligences secrètes d’Andronic avec les Turcs et les Hongrois, forcèrent Manuel à le faire arrêter. Il languissait depuis quatre ans dans une tour du palais, lorsqu’il parvint à pratiquer dans sa prison une issue qu’il masqua adroitement, mais qui ne le conduisit que dans un cachot voisin. Cependant le bruit de son évasion se répandit dans Constantinople ; Manuel, irrité et ne sachant qui soupçonner de cette délivrance, fit enfermer la femme d’Andronic dans le même cachot d’où son mari venait de sortir ; les gémissements de cette infortunée la firent bientôt reconnaître du captif, qui parut tout à coup à ses yeux comme un spectre sortant d’un tombeau ; il lui confia le secret de sa retraite, vécut avec elle sans qu’on le soupçonnât, et en eut un fils : il profita même du peu de surveillance qu’on crut pouvoir mettre à la garde d’une femme pour s’échapper ; mais il fut repris, et ce ne fut qu’après douze ans de détention qu’une tentative plus heureuse lui fit recouvrer la liberté. Il traversa la Moldavie, trompa un corps de Valaques qui l’avaient arrêté, et se retira en Russie. Cependant Manuel ayant porté la guerre en Hongrie, Andronic saisit cette occasion pour rentrer en grâce ; il persuada aux Russes de s’unir aux Grecs, et contribua lui-même, par sa valeur, à la prise de Zeugmine ; ce qui lui valut un pardon absolu. De nouvelles offenses, de nouveaux désordres, des projets ambitieux déclarés ouvertement, éveillèrent encore les craintes de Manuel ; Andronic séduisit successivement Philippa, sœur de l’impératrice Marie, et Théodora, veuve de Baudouin III, roi de Jérusalem. Il était enfin relégué à Oenoë, ville du Pont, lorsque la mort de Manuel ouvrit un vaste champ à son ambition. La jeunesse du nouvel empereur Alexis II, l’imprudence de sa mère, l’impératrice Marie, et sa faiblesse pour le protosebaste Alexis, dont l’insolent orgueil écrasait l’empire et irritait la noblesse, enfin les troubles auxquels les partis livraient la capitale, firent tourner les yeux vers Andronic, dont les émissaires secrets disposaient adroitement les esprits, et Constantinople courut avec joie au-devant du tigre qui allait l’arroser de sang. Andronic publie qu’il va sauver l’empire ; il ne parle plus que de son dévouement pour l’État et pour son jeune prince ; enfin il arrive devant Constantinople ; la flotte se rend à lui, le peuple lui livre le protosebaste, auquel il fait crever les yeux. Cependant on s’égorge dans la ville ; Andronic y entre en maître irrité, s’empare de tous les palais, reçoit des délations, multiplie les châtiments, se défait de tout ce qui lui cause quelque ombrage, et prélude aux plus grands crimes, en faisant empoisonner la princesse Marie, sœur du jeune empereur, pour lequel il affecte cependant un dévouement sans bornes. Il donne ensuite la plus grande pompe au couronnement d’Alexis, et le porte à l’église sur ses épaules, en versant des larmes d’attendrissement ; mais bientôt il cherche à irriter ce malheureux enfant contre sa mère, et il le force à signer lui-même l’arrêt de mort prononcé contre cette princesse par les satellites du tyran. Deux jours après, elle fut étranglée. La famille impériale tombait autour du faible rejeton qui occupait encore le tronc ; le vertueux Théodose, patriarche de Constantinople, s’éloigna d’une ville où son ministère eût été souillé par l’aspect de tant de forfaits. Andronic, débarrassé de ce dernier obstacle, fit répandre par ses émissaires que, les divisions croissant tous les jours, il fallait mettre à la tête des affaires un homme d’une expérience consommée. La plus vile populace, excitée