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d’Espagne ; et ce mémoire, mis sous les yeux du souverain pontife, contribua beaucoup à lever les obstacles qui s’opposaient encore à leur admission en Italie. Andrès fut d’abord chargé de professer la philosophie à Ferrare, dans le collège de son ordre ; mais le pape Clément XIV en ayant prononcé la suppression, il se rendit à Mantoue chez le comte de Bianchi, dont les bontés, qu’il reconnut en surveillant l’éducation de ses enfants, lui assurèrent une existence honorable. L’académie de cette ville venait de mettre au concours un problème d’hydraulique (de ascensu aquæ) ; Andrès entreprit de le résoudre, et son mémoire balança celui de Fontana (voy. ce nom), qui fut couronné. Bientôt après, son Essai sur la philosophie de Galilée lui ouvrit les portes de l’académie. Cet ouvrage, dans lequel les services rendus aux sciences par le philosophe Florentin sont appréciés avec un talent et une impartialité remarquables, étendit la réputation d’Andrès dans toute l’Italie. S’il eut voulu rentrer dans la carrière de l’enseignement, les plus célèbres universités se seraient empressées de l’accueillir ; mais il avait déjà conçu l’idée du grand et bel ouvrage qui lui garantit une des premières places parmi les savants de son siècle. Il ne s’agissait de rien moins que de tracer la marche de l’esprit humain dans les diverses routes qu’il s’est ouvertes depuis les temps les plus reculés, en montrant la cause de ses progrès ou de ses aberrations. Jamais plus vaste plan ne s’était présenté à l’imagination ; et il est encore inconcevable qu’un seul homme ait entrepris de le réaliser. Pour rassembler les matériaux immenses dont il avait besoin, Andrès employa plusieurs années à visiter les principales bibliothèques d’Italie et d’Allemagne, et il perfectionna ses connaissances par la fréquentation des savants. De retour à Mantoue, il s’occupait sans relâche de la rédaction de son ouvrage, lorsque l’approche des armées françaises, en 1796, l’obligea de quitter cette ville. Sur les instances du duc de Parme, il consentit à se rendre dans cette ville, où il vécut longtemps avec le titre et la pension de professeur au collège de Colorno, mais sans aucune fonction ni charge à remplir ; Le duc n’avait pas voulu que rien pût le détourner de son grand travail, qu’il eut enfin la gloire de terminer en 1799, après plus de vingt années de soins et d’application. Après la retraite des Français, Andrès fut charge par l’empereur d’Autriche de réorganiser l’université de Pavie. Bientôt le duc de Parme le nomma son bibliothécaire, et l’admit à son conseil intime. Mais, lors du rétablissement des jésuites dans le royaume de Naples, en 1804, il n’hésita pas à quitter le poste brillant qu’il occupait à Parme pour rejoindre ses confrères, et les aider, autant que ses forces pourraient le lui permettre, à l’accomplissement de la tache que leur imposait la volonté du souverain pontife. Nommé conservateur de la bibliothèque royale et censeur, il ne crut pas que ce double titre le dispensât des devoirs d’un religieux, et il les remplit avec un zèle digne d’éloges. L’occupation du royaume de Naples par les Français força les jésuites à se retirer en Sicile ; mais, protégé par sa réputation, le P. Andrés ne partagea pas le nouvel exil de ses confrères. Il n’eut qu’à se louer des procédés de Joseph Bonaparte et de Murat, qui le nomma chef ou préfet de la bibliothèque royale. Ses talents avaient depuis longtemps marqué sa place à l’académie napolitaine ; et celle des antiquités l’élut son secrétaire. Après la chute de Murat, en 1815, Andrès sollicita, la permission de se retirer dans la maison de son ordre à Rome. Privé depuis quelque temps de la vue, il se soumit à l’opération de la cataracte, mais ce fut sans succès. Outre une édition des Lettres latines et italiennes d’Antoine Augustin (voy, ce nom), précédées d’une bonne dissertation, Parme, 1804, in-4o, on lui doit une foule d’opuscules curieux : Sur le revers d’une médaille mal expliquée par Mattei, Mantoue, 1778, in-8o ; — Sur une démonstration de Galilée, Ferrare, 1779, in-8o ; — Sur la musique des Arabes, Venise, 1787, in-8o ; — Sur une carte géographique de 1455, Naples, 1815, in-8o ; — Sur les Milésiens. ─ Sur l’usage de la langue grecque dans le royaume de Naples, ibid., 1816 ; ─ Sur deux poëmes grecs conservés à la bibliothèque Laurentienne de Florence, l’un de Jean d’Otrante, et l’autre de George de Gallipoli, poëtes du 13e siècle ; — Sur le culte d’Isis et quelques inscriptions trouvées dans un temple qui lui était consacré ; ─ Sur la découverte de Pompéia, et d’Harulanum ; — Sur la figure de la terre ; — une apologie de Virgile sur l’anachronisme d’Énée et de Didon ; et enfin une dissertation sur les commentaires d’Eustathe sur Homère, etc. Mais ses principaux ouvrages sont : 1° Dissertazione sopra un problema idrostatico, Mantoue, 1775, in-4o. C’est la pièce qu’il avait envoyée au concours, et qui fut imprimée aux frais de l’académie. 2° Saggio del filosofia del Galileo, ibid., 1776, in-4o. C’est un des meilleurs ouvrages que Galilée ait inspirés. 3° Lettera sopra il corrompimento del gusto italiano, Crémone, 1776, in-8o. Andrès y venge les Espagnols du reproche que leur adressait Tiraboschi d’avoir corrompu le goût en Italie. (Voy. Tiraboschi.) 4° Dissertazione sopra la ragione della scarzezza di progressi delle scienze in questo tempo, Ferrare, 1779, in-4. 5° Dell’ origine, de progressi, e dello alato attuale d’ogni letteratura, Parme, 1782-89, 7 vol. in-4o[1] ; Venise, 1808-17, 8 vol. in-4o ; Pistoie, 1818, 8 vol. in-4o ; Pise,1821, 23 vol. in-8o. C’est, de tous les ouvrages d’Andrès, celui qui lui fait le plus d’honneur. Il suppose autant de goût que d’érudition et des connaissances très-étendues dans tous les genres. Quelques idées singulières, des jugements hasardés sont les seules taches que la critique ait signalées dans ce beau monument. Andrés attache une grande importance à l’influence que les Arabes eurent à la renaissance des lettres ; et cette partie de son ouvrage en est peut-être la plus neuve et la plus remarquable par les recherches de l’auteur, qui avait consulte tous les manuscrits arabes de la bibliothèque de l’Escurial. Cependant quelques critiques ont pensé qu’il y avait de sa part sur ce point

  1. Les éditions suivantes ont été revues et augmentées par l’auteur ; mais l’édition de Parme, qui est très-belle, peut être complétée par un 8e volume dans lequel ou a réuni les changements et additions faites par Andrès lui-même.