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ANA

d’Hyllée, il fut tué d’un coup de flèche par son propre frère Saulius, devenu roi du pays, et qui ne lui pardonna pas d’avoir préféré les diex de la Grèce à ceux de la Scythie. Anacharsis fut un des hommes les plus vertueux de l’antiquité. L’histoire nous a conservé plusieurs de ses apophtegmes, qui feront aisément connaître son caractère : « La vigne, disait-il, porte trois fruits ; le premier, de volupté ; le second, d’ivresse ; le troisième, de repentir. — Les turpitudes d’un ivrogne sont la meilleure leçon de tempérance. » Interrogé quel devait être le souverain le plus illustre ? « Le plus sage, » répondit-il. — Quelle était la meilleure forme de gouvernement ? « Celle où l’on n’admet d’autre distinction que l’éclat des vertus, et l’opprobre du vice. » — Le premier, il compara les lois aux toiles d’araignées. — « Chez les Athéniens, disait-il, ce sont les sages qui discutent, et les fous qui décident. — Je les admire, ajoutait-il ; ils usent de petites coupes au commencement du repas, et de grandes, quand ils sont ivres. » — Un Grec lui reprochait d’être Scythe : « Ma patrie fait mon déshonneur, répondit-il, et toi, celui de ta patrie. » La vivacité de ses répartis, la force de ses arguments, donnèrent lieu à cette expression proverbiale, un discours scythe. Il écrivit en vers héroïques sur les lois de son pays, sur l’art de la guerre, sur la frugalité. Mais les lettres publiées sous son nom, Paris, 1552, gr. et lat., in-4o, et réimpr. dans les Épistol. grec., sont apocryphes. Nous avons son portrait dans le Laërce de Westein, et dans les Antiquités grecques de Gronovius. Chez les anciens, ses images portaient ordinairement cette inscription : Linguam, ventrem, veretrum contine. L’abbé Barthélemy a rendu son nom immortel. D. l.


ANACLET ou CLET (Saint), pape. Les anciens biographes distinguaient deux personnes différentes sous ces deux énonciations ; les écrivains modernes, et notamment les auteurs de l’Art de vérifier les dates, n’en admettent plus qu’une, qui a occupé le saint-siége depuis l’an 78 jusqu’en 91. C’est un point historique universellement reconnu aujourd’hui. Anaclet était originaire d’Athènes ; les Latins l’ont appelé Clet par abréviation, et de là est venue l’erreur. Il vint à Rome, y fut converti par les apôtres, et associé au saint ministère. St. Pierre lui confia, pendant son absence, le gouvernement de l’Église, conjointement avec St. Lin et St. Clément. Il succéda au premier, suivant l’opinion des historiens actuels ; les autres le faisaient succéder à St. Clément. L’Église latine honore St. Anaclet comme martyr, ce qui signifie seulement qu’il éprouva quelques persécutions pendant sa vie ; car il ne s’est passé de son temps aucun événement qui prouve qu’il ait terminé sa vie dans les supplices. On a quelques fausses Décrétales sous le nom de ce pape. D-s.


ANACLET, antipape, élu en 1130, après la mort d’Honorius II, par une petite partie des cardinaux, dont la majorité, quelques jours auparavant, avait choisi Innocent II. Anaclet s’appelait, Pierre de Léon, ainsi que son aieul. Ce dernier, juif de naissance, puis converti et baptisé par le pape Léon, était savant, extrêmement riche et très-considéré. Son fils, père d’Anaclet, doué des mêmes avantages et de plus grandes qualités, jouit d’une grande faveur auprès du pape Pascal II. Il servit si bien l’Église romaine dans la querelle des investitures, et par ses armes, et par ses conseils, qu’on lui donna le gouvernement de la tour de Crescence, ou château St-Ange. Anaclet se destina d’abord aux lettres, et vint étudier en France, où il prit l’habit de l’ordre de Cluny, ce qui donnait, dans ce temps-là, une grande considération. Étant encore très-jeune, il servit d’otage pour le pape entre les mains de l’archevêque de Cologne. Il fut rendu, en 1119, au concile de Reims, où il parut, dit Fleury, « magnifiquement vêtu, mais noir, pâle et de si et mauvaise mine, que tous les assistants le trouvaient plus semblable à un juif, ou a un Sarrasin, qu’à un chrétien. » Calixte II le fit bientôt cardinal, et l’envoya légat en France, conjointement avec Innocent II, auquel depuis il disputa la tiare. Anaclet, nommé ainsi qu’on vient de le voir, fit tout ce qu’il put pour se maintenir. Il tint Innocent II assiégé dans le palais de Latran, et s’empara de la basilique, et du trésor de St-Pierre. Il en fit autant de Ste-Marie-Majeure, et des autres églises de Rome. Maître de la ville et du territoire, après avoir forcé Innocent II de fuir, il négocia partout pour se faire des appuis et se procurer des suffrages : il donna sa sœur en mariage à Roger, duc de Sicile, auquel il conféra le titre de roi ; il écrivit à toutes les puissances pour se faire reconnaître. Le schisme s’établit, et la contestation fut longue. Condamné par les conciles de Reims et de Pise, rejeté par la plus grande partie du clergé de toute la chrétienté, méconnu par tous les souverains, excepté Roger et le duc d’Aquitaine, Anaclet se soutint dans Rome malgré les armes de l’empereur Lothaire, qui protégeait Innocent II, et dont les troupes victorieuses avaient dépouille Roger d’une grande partie de ses États. Il mourut à Rome, le 7 janvier 1138, après huit ans d’une élévation contestée. Aussitôt après sa mort, ses frères reconnurent Innocent II, et le schisme cessa. Voltaire l’appelle le pape juif, quoiqu’il n’ait été, véritablement, ni l’un ni l’autre. Anaclet a été fortement décrié par St. Bernard, et surtout par Arnoul, archidiacre de Séez, dans un traité adressé à Geoffroy, légat du pape Innocent. Arnoul reproche à Pierre de Léon le vice de sa naissance, les usures de ses parents, l’infamie de sa jeunesse, son luxe, sa profusion, ses débauches, et enfin un commerce incestueux avec sa sœur. (Voy. Fleury, Hist. eccl.) Toutes ces accusations ont un caractère d’animosité qui peut y faire soupçonner de l’exagération. Fleury dit simplement que telle était alors la réputation d’Anaclet. (Voy. {{sc|Innocent II.) D-s.


ANACOANA. Voyez Ovando.


ANACRÉON naquit à Téos, en Ionie ; il vivait vers la 71e et la 72e olympiade (l’an 530 avant J.-C.) ; voilà tout ce qu’on sait de certain sur son compte. On croit que Polycrate, tyran de Samos, l’attira à sa cour, et lui accorda son amitié et ses faveurs. Le voluptueux