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Ameilhon s’opposa vivement, et avec un courage qui n’était pas alors sans danger, aux démonstrations furieuses d’un attroupement qui voulait pénétrer dans l’église des jésuites pour y abattre les fleurs de lis. La nef et le chœur étaient remplis de livres. Ce précieux dépôt allait être abimé par les démolitions : Ameilhon tint ferme ; il refusa de céder aux prières et aux menaces, et alors, pour sauver les livres, il trouva bon que les fleurs de lis restassent sans outrage. Enfin la république tomba sous l’épée d’un soldat heureux. Les sanglantes fureurs des factions populaires ouvrirent une voie facile au despotisme ; et, après tant d’agitations et de malheurs, la France se vit réduite à chercher le calme et le repos dans le sacrifice de ses libertés. Ameilhon reprit alors ses travaux littéraires si longtemps négligés ou interrompus. Il put enfin terminer, en 1811, peu de jours avant sa mort, sa continuation de l’Histoire du Bas-Empire, dont le premier volume avait paru plus d’un demi-siècle auparavant (1757 ; voy. Lebeau. Lors de la création de l’Institut, il avait été admis dans la classe de l’histoire et de la littérature ancienne. Ses travaux enrichirent la collection des Mémoires de ce premier corps de l’Europe savante et littéraire. Il avait été nommé, en 1797, conservateur de la bibliothèque de l’Arsenal, qui dut à l’activité de son zèle une meilleure organisation. Dans un âge avancé, toujours laborieux, toujours infatigable, il suivait, avec une assiduité peu commune, les séances de l’Institut et celles de la société centrale d’agriculture. Il était un des plus actifs collaborateurs de Millin, dans la rédaction du Magasin encyclopédique. Il était âgé de 81 ans, lorsqu’il mourut marguillier de sa paroisse. Ce n’est pas le nombre qui manque à ses travaux littéraires, d’ailleurs estimables pour la plupart ; en voici la liste : 1o  Histoire du commerce et de la navigation des Ègyptiens, nous le régime des Ptolémées, Paris, 1766, in-8o. L’auteur fait connaître combien était étendu le commerce qui se faisait alors par la voie d’Alexandrie, et quelles étaient les routes par terre et par mer que les commerçants suivaient pour aller aux Indes. 2o  Histoire du Bas-Empire. Lebeau avait donné les 21 premiers volumes de cet ouvrage : Ameilhon termina le 22e qu’il publia, ainsi que les tomes 24 à 27 et dernier. La publication de cette histoire, commencée en 1757, ne fut achevée qu’en 1811. On y joint des tables par Ruvier, 1817, 2 vol. On a dit que Lebeau avait souvent le mérite de Rollin, et qu’Ameilhon n’était pas inférieur à Lebeau. On peut adopter ce jugement sans croire néanmoins que la France ait dans ces auteurs trois grands historiens. 3o  Remarques critiques sur l’espèce d’épreuve judiciaire appelée vulgairement l’épreuve de l’eau froide. Les sorciers, très-nombreux dans le moyen âge, étaient particulièrement soumis à cette sorte d’épreuve. Alors les peuples ignorants et superstitieux croyaient que les sorciers ne pouvaient aller au fond de l’eau, et ceux qui, soumis à l’épreuve, surnageaient étaient condamnés à périr dans les flammes. Amelhion croit que ceux qui se mêlaient de sorcellerie étaient atteints d’affections vaporeuses et nerveuses, et que dans des temps où cette maladie était peu connue, il n’était pas étonnant qu’on prit les symptômes et les accidents extraordinaires qui souvent l’accompagnent pour des effets surnaturels. Ce mémoire a été inséré dans le 37e volume du recueil de l’académie des belles-lettres. 4o  Recherches sur l’exercice du nageur chez les anciens et sur les avantages qu’ils en retiraient. On trouve ce mémoire dans le 38e volume du même recueil. Ameilhon avait voulu exciter les parents et les instituteurs à faire entrer la natation dans l’éducation de la jeunesse. 5o  L’art du plongeur chez les anciens (même recueil, tome 40). Ameilhon fait voir que, parmi les moyens employés par les anciens pour rester longtemps sous l’eau, il en était un qui peut passer pour l’ébauche de notre cloche du plongeur. 6o  Sur le Télescope (même recueil, tome 42). Dutens prétendait avoir démontré, dans son Origine des découvertes attribuées aux modernes, que l’usage des télescopes avait été connu des anciens. Ameilhon combat cette opinion ; il soutient qu’il n’est aucune des découvertes faites dans le ciel par les astronomes de l’antiquité, à laquelle la vue simple n’ait pu parvenir. Il combat toutes les preuves données par Dutens, et cherche à démontrer qu’il n’a pas saisi le véritable sens des autorités sur lesquelles il s’appuie. L’auteur de cette dissertation fixe l’origine des verres optiques. 7o  Sur la Métallurgie ou l’art d’exploiter les mines chez les anciens. Ce mémoire ne contient que l’exploitation de l’or, et fait connaître les travaux immenses entrepris dans l’antiquité pour arracher les métaux du sein de la terre. 8o  Sur les couleurs connues des anciens, et sur les arts qui peuvent y avoir rapport. Ce mémoire est imprimé dans le 1er volume du recueil de l’institut, classe de littérature et des beaux-arts. 9o  L’Art du foulon chez les anciens L’auteur établit que la saponaire est le struthium dont les anciens se servaient pour blanchir les toiles et les étoffes, et que, du temps de Dioscoride, le dipsacus ou chardon à bonnetier n’était pas encore en usage dans les ateliers des foulons. 10° Sur différentes espèces de Spartes, dont il est parlé dans les auteurs grecs et latins. Ce long mémoire, qui tient à l’histoire de l’ancienne botanique, a été inséré, ainsi que les trois mémoires suivants, dans le 2e volume de la classe de la littérature et des beaux-arts. 11° Sur la Pêche des anciens. 12° Explication d’une inscription tronquée et gravée en latin sur un cuivre qui a été trouvé dans le voisinage de Tunis. 13° Projet sur quelques changements qu’on pourrait faire à nos catalogues de bibliothèques pour les rendre plus constitutionnels. Ce mémoire contient des observations sur le caractère, les qualités, les fonctions et les devoirs d’un vrai bibliothécaire. L’auteur n’a eu qu’à se peindre lui-même, et l’expérience d’un demi-siècle, ses longs et utiles travaux donnent à ce mémoire beaucoup d’autorité. 14° Plusieurs articles sur la collection de manuscrits grecs désignés sous le nom de Chemici veteres, dans les Notices et Extraits des manuscrits de la bibliothèque du roi, recueil publié par l’académie des belles