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sans nom d’auteur, qui a pour titre : Nouvelle agréable de l’établissement prochain d’un tribunal d’inquisition protestant, et d’un auto-da-fé luthérien qui aura lieu en attendant en effigie, est une satire ingénieuse contre l’esprit de persécution qui animait alors plusieurs théologiens protestants ; quoiqu’il porte la date d’Hambourg, 1766, in-8o, il a été réellement imprimé à Berlin. Les Réflexions sur le plan des premières études d’un jeune homme de condition, Leipsick et Berlin, 1767, in-8o, ont été composées en 1759, mais elles n’ont été imprimées qu’après la mort d’Abbt, par les soins d’un major de troupes rhénanes. Il y en a eu une seconde édition à Berlin, 1780, in-8o. Abbt s’est aussi essayé dans le genre de l’histoire ; on a de lui un livre qui a pour titre : Fragment des événements les plus anciens du genre humain, avec une préface de Jean-Pierre Miller, Halle, 1767, grand in-8o. C’est le commencement d’un abrégé d’histoire universelle ; Abbt ne l’ayant pas continué, M. Miller a publié après sa mort ce qu’il en avait fait, en lui donnant le titre qu’on vient de lire ; une Histoire du Portugal jusqu’à la fin du 13e siècle ; une Vie de Baumgarten. La Traduction de la conspiration de Catilina, par Salluste, Stadthagen, 1767, in-8o, est regardée comme un de ses meilleurs ouvrages. Elle a été publiée après la mort de l’auteur, au profit de son père, mais aux frais du comte de la Lippe. Il existe une autre traduction allemande de Salluste sous le nom d’Abbt, publiée à Lemgow 1772, par Wagner d’Osnabruck ; mais on prétend qu’il n’y a eu aucune part. Ses Œuvres diverses ont été recueillies par Nicolaï, en 6 vol. qui ont paru à Stettin et à Berlin, de 1768 à 1781, in-8o. Il y en a eu des contrefaçons à Reutlingen, 1782, et à Francfort, 1783. Nicolaï y a réuni plusieurs écrits qui n’avaient pas encore été imprimés. Le 3e et le 5e tome contiennent la correspondance d’Abbt avec MM. Blum, Gause, Gleim, Klotz, Moses Mendelssohn, Nicolaï et autres ; le 3e a aussi été imprimé séparément sous ce titre : Œuvres diverses de Th. Abbt, 3e partie, qui contient sa correspondance familière, Berlin et Stettin, 1782, in-8o. On distingue dans le 4e la Vie de Baumgarten, et dans le 5e celle du comte de Schaurnbourg. Ses œuvres complètes en 6 tomes été réimprimées à Berlin, en 1790, in-8o. Outre les ouvrages qu’on vient de citer, il existe encore quelques petits traités et Mémoires du même auteur, insérés dans différents recueils : dans le Journal hebdomadaire allemand, intitulé : le Règne de la nature et des mœurs (Halle, 1757 et suiv.) ; dans les Annonces de Halle, 1760, no 12, et dans la Bibliothèque générale de l’Alllemagne. La liaison de Abbt avec Lessing, Moses Mendelœohn, et d’autres écrivains du premier ordre, l’avait engagé à devenir leur coopérateur, et, depuis 1760, il a eu beaucoup de part aux Lettres concernant la littérature moderne, journal célèbre, dont la publication a fait époque dans l’histoire littéraire de l’Allemagne. La 148e lettre du 9e volume est la première qui soit de lui. Ses articles dans ce recueil sont signes de la lettre B. La vie d’Abbt a été écrite en allemand par Frédéric Nicolaï et publiée à Berlin, en 1767, in-4o, sous le titre de Monument à la méoire de M. Th. Abbt. On en trouve un extrait dans la Bibliothèque historique de Gatterer, t. 6., A. L. M.


ABDALLAH-BEN-ZOBAÏR, calife de la Mecque. Les excès auxquels se portait le calife de Syrie, Yézyd, contre les descendants d’Ali, ayant indisposé les habitants de la Mecque, ils élurent pour chef Abdallah-Ben-Zobaïr, qui se trouvait a la tête des partisans de la maison de Hachem, opprimée par Yézyd. Moawyah, père du calife de Syrie, parlant, a son fils du caractère de ses antagonistes, lui avait dit : « Abdallah-Ben-Zobaïr est l’homme que vous devez le plus craindre ; il a un génie entreprenant et capable de tout. Il vous attaquera avec la force du lion et la subtilité du renard. » Abdallah ne tarda pas à justifier cette prédiction. Il se rendit a la Mecque : et, après la bataille de Kerbelah, dans laquelle Hocéin, fils d’Ali, fut tué, les habitants de la Mecque et de Médine, dont Abdallah s’était attire l’affection par son zèle religieux et ses manières affables, le proclamèrent calife, l’an 680 (62 de l’hég.). À la nouvelle de cet événement, Yézyd envoya vers Abdallah un officier avec un collier d’argent, et l’ordre de lui dire que, s’il reconnaissait son autorité, il resterait en paix à la Mecque, mais qu’autrement on mettrait ce collier à son cou pour l’amener à Damas : Abdallah refusa la proposition, et Yézyd leva une armée qui d’abord pilla Médine, et ensuite assiégea Abdallah dans la Mecque. Le siége fut poussé avec vigueur ; mais, à la mort d’Yézyd, l’armée retourna à Damas, et Abdallah fut laissé paisible possesseur du califat. Toutes les provinces le reconnurent, à l’exception de la Syrie et de la Palestine ; et il régna paisiblement pendant neuf ans. Alors le calife Abdel-Mélek, qui avait défait et tué Mosah, frère d’Abdallah, envoya contre lui-même le célèbre Hédjadi, son général. Abdallah vaincu se réfugia dans la Mecque, et soutint le siége pendant sept mois avec une grande fermeté, quoiqu’il eût été abandonné par ses deux fils. Sa mère, âgée de quatre-vingt-dix ans, animait son courage et celui de ses soldats. À la fin, Abdallah, après s’être fortifié par un breuvage mêlé de musc qu’elle lui présenta, prit congé d’elle, et s’élança contre les ennemis. Il en tua un grand nombre de sa propre main ; mais, obligé de faire retraite, il se plaça dans un endroit de la ville où l’on ne pouvait l’attaquer que de face, et continua de se défendre. Les assiégeants l’assaillirent à coups de pierres, et quand il sentit son sang couler le long de son visage, il récita ce vers d’un poëte arabe : « le sang de nos blessures ne tombe pas sur nos épaules, mais sur nos pieds. » Il succomba enfin, et sa tête fut coupée et portée à Abdel-Mélek. Il était âgé de 72 ans. Les écrivains arabes vantent beaucoup le courage d’Abdallah ; mais ils lui reprochent son extrême avarice, qui donna lieu à ce proverbe : « Avant Abdallah on n’avait jamais vu d’homme brave qui ne fut libéral. » On cite pour preuve de sa piété et de son attention à prier, qu’un jour, tandis qu’il s’acquittait de ce devoir, un pigeon se posa sur sa tête, et y resta longtemps sans qu’il s’en aperçut. La famille de Zobaïr, père d’Ab-