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tyrannique, les grands le poignardèrent, et rappelèrent leur souverain légitime. Rétabli sur le trône, Alphonse publia une amnistie, et n’en fut pas plus tranquille. Jamais prince n’eut à combattre autant de factions et de révoltes, restes de l’esprit remuant des Goths. Les seigneurs, déjà trop puissants, étaient jaloux de voir le sceptre devenir en quelque sorte héréditaire dans une même famille. Alphonse voulut borner leur autorité ; mais plusieurs d’entre eux se révoltèrent dans la province d’Alava et en Galice : deux fois il lui fallut réduire par la force la première de ces deux provinces. Enfin, il put tourner ses armes contre les ennemis du dehors, et illustrer son règne par plus de trente campagnes, et par un grand nombre de victoires remportées sur les Maures. Dès 869, ils avaient voulu profiter des troubles qui agitaient les États d’Alphonse, pour y faire une irruption. Après les avoir défaits, ce prince porta la guerre sur leur territoire, passa le Duéro, renversa les murs de Coimbre, pénétra jusqu’au Tage et dans l’Estramadure, augmenta ses États d’une partie du Portugal et de la Vieille-Castille, agrandit et repeupla Burgos. Il lit un partage des terres entre les nouveaux habitants, exemple qui fut imité par ses successeurs, à mesure qu’ils étendirent leurs conquêtes sur les musulmans. Tant d’entreprises glorieuses et solides ne mirent point Alphonse à l’abri des conspirations et des révoltes. À peine avait-il étouffé un complot qu’il s’en formait un autre. Ayant été forcé d’augmenter les impôts pour soutenir ses longues guerres, le mécontentement éclata, et Alphonse eut la douleur de voir son propre fils, don Garcie, à la tête des mécontents. Ce prince s’arma contre son père, en 888, et entreprit de lui ravir la couronne, sous l’apparence du bien public ; mais la fermeté d’Alphonse ne l’abandonna point : il fondit, avec son activité ordinaire, sur les troupes de son fils, et, l’ayant surpris lui-même, il le fit prisonnier, et le condamna à une dure captivité dans le château de Gauson. Cette juste sévérité ne fit qu’irriter les mécontents. et souleva toute la famille royale. La reine Dona Ximena arma ses doux autres fils contre le roi, et forma une ligue puissante en faveur de Garcie. Le peuple et les grande se déclarèrent en faveur de ce dernier, et une guerre funeste déchira l’État, jusqu’à ce que, vaincu dans une bataille par ses propres enfants, le roi céda au torrent de la révolte, et rendit le calme à ses sujets en abdiquant la couronne, qu’il remit lui-même à don Garcie dans l’assemblée des états. Condamné alors à une vie obscure et si éloignée de ses inclinations ; privé du sceptre par l’ingratitude de ses sujets et de ses enfants, Alphonse voulut encore combattre pour eux ; et ayant obtenu, en 912, de faire une campagne contre les Maures, en qualité de lieutenant de son propre fils, il les battit et revint chargé de leurs dépouilles. Cette expédition fut son dernier exploit. Il mourut à Zamora, le 20 décembre de la même année, à l’âge de 64 ans. Il en avait régné 46, jusqu’à son abdication. Ce prince mérita le titre de Grand par ses victoires, plus que par la sagesse de son administration. Il avait néanmoins relevé plusieurs villes, et protégé les savants. On croit qu’il écrivit lui-même une chronique, qui finit à la mort d’Ordogno, son père, et remonte à Wamba, vers la fin du 7e siècle. Il gouverna ses peuples avec un sceptre de fer ; son caractère sombre, farouche et souvent cruel, le rendit odieux à sa famille et à ses sujets ; mais on ne peut voir sans étonnement ce prince punir en roi son fils rebelle, le couronner ensuite lui-même, pour mettre fin à la guerre civile, puis lui obéir, et se montrer son plus fidèle sujet. Le royaume, qu’il avait agrandi, comprenait, à sa mort, les Asturies, la Galice, une partie du Portugal et de la Vieille-Castille, avec le royaume de Léon. En séparant la Galice de ses autres États, en faveur d’Ordogno, son second fils, il donna un exemple dangereux a ses successeurs, qui l’imitèrent. B-p.


ALPHONSE IV, dit le Moine, roi de Léon et des Asturies, fils aîné d’Ordogno II, monta sur le trône en 924 ; mais, n’ayant aucune des qualités nécessaires pour régner, il abdiqua la couronne, en 927, en faveur de son frère Ramire, et au préjudice de son fils Ordogno. Il se fit moine dans le monastère de Sahagun ; mais bientôt, ennuyé d’une retraite où la légèreté l’avait conduit, il rassembla ses partisans, et reprit les armes. dans le dessein de remonter sur le trône. La ville de Léon s’était déclarée en sa faveur ; il s’y réfugia, poursuivi par Ramire, qui vint former le siége de cette capitale. Un an après, la famine obligea les habitants de lui ouvrir leurs portes, et de livrer Alphonse. Ce malheureux prince se jeta inutilement aux pieds de son frère, qui, pour n’avoir plus rien à craindre de ses entreprises, lui fit crever les yeux, et le renferma étroitement dans le monastère de Ruiforco, près de Léon, où il mourut l’année suivante, 933. B-p.


ALPHONSE V, roi de Léon et de Castille, n’avait que cinq ans lorsqu’il succéda, en 999, à son père, Bermude II, sous la tutelle et la régence de dona Elvire, sa mère, et de don Melando Gonzalès, comte de Galice, qui concoururent l’un et l’autre à en faire un prince juste et vertueux. En 1014. Alphonse épousa la jeune Elvire, fille du comte de Galice, et il prit, l’année suivante, les rênes du gouvernement, releva les murs de Zamora et de Léon, fit prospérer ses États, et adoucit les mœurs de ses sujets. Tandis qu’il les faisait jouir des bienfaits d’une administration paternelle, l’Espagne musulmane était déchirée et affaiblie par l’ambition des émirs on gouverneurs des provinces, qui usurpaient et se partageaient la souveraineté. Jamais occasion si favorable ne s’était offerte aux chrétiens pour attaquer leurs ennemis. Alphonse on profita, et suivit le système de ses prédécesseurs : il passa le Duéro, en 1026, à la tête d’une armée bien disciplinée, et vint, l’année suivante, former le siégé de Viseu ; mais, étant allé sans cuirasse, à cause des grandes chaleurs, reconnaître les murailles de cette place, il fut tué d’un coup de flèche tiré des remparts. Il n’était âge que de 33 ans, et en avait régné 28. B-p.


ALPHONSE VI, roi de Léon, de Castille et de Galice. Ferdinand le Grand, son père, ayant divisé