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il eut sous ses ordres une division de frégates avec lesquelles il remplit une mission à l’île d’Elbe et à Corfou. Nommé vice-amiral en 1809, il fut chargé du commandement en chef des escadres de Brest et de Toulon réunies à celle de Rochefort. Cette armée était mouillée en rade de l’île d’Aix, lorsque, le 6 avril, l’amiral anglais Cochrane parut avec douze vaisseaux de ligne, six frégates, onze corvettes, et cinquante bâtiments armés en brûlots. Allemand, prévoyant une entreprise contre son armée, la disposa sur deux lignes de bataille endentées très-serrées. l’une au N. quart N.-0., et l’autre au S. quart S.-E., afin de présenter moins de surface. En même temps il établit à environ 400 toises au large une estacade de 800 toises de longueur, dont l’extrémité nord était à une encablure et demie des rochers de l’île. Le 12, à huit heures et demie du soir, par un vent très-violent, les brûlots ennemis, au nombre de trente-trois, et trois machines infernales, mirent à la voile : les quatre premiers vinrent faire explosion contre l’estacade, deux autres leur succédèrent, et bientôt tous les suivirent. L’estacade les arrêta pendant quelques minutes, mais ils la franchirent à la fin, et arrivèrent sur l’armée française en gouvernant sur le vaisseau l’Océan, qui était au centre de la ligne. À l’apparition des brûlots, le signal avait été donné de filer les câbles par le bout, et même de les couper au besoin. Cette manœuvre sauva ceux des bâtiments qui l’exécutèrent à temps ; mais le lendemain, au jour, on vit échoués sur les palles trois vaisseaux et une flûte qui, n’ayant pu être relevés, s’étaient incendiés. Cette affaire donna lieu à un jugement par suite duquel un capitaine de vaisseau fut fusillé, un autre dégradé, et un troisième condamné à trois mois de détention[1]. de 1809 à 1812, le vice-amiral Allemand commanda l’armée navale dans la Méditerranée sur les vaisseaux le Lion et l’Austerlitz, et l’escadre de Lorient sur l’Eylau. Avec cette dernière, il fit dans l’océan une campagne pendant laquelle il s’empara d’un grand nombre de bâtiments anglais, qu’il brûla ou coula à fond. Au mois de décembre 1813, l’empereur lui confia le commandement des divisions de flottilles réunies à Flessingue et à Anvers. À cette époque, l’île de Cadsand et celle de Walcheren étaient menacées par les Anglais, et Napoléon avait compté sur l’habileté et la valeur d’Allemand pour les défendre ; il était indispensable qu’il concertât les opérations de la flottille avec les mouvements de l’année de terre, et qu’il s’entendit à cet égard avec les généraux qui commandaient dans ces îles : mais le caractère inquiet et tracassier de cet amiral étant de nature à compromettre également ceux qui avaient à lui donner des ordres et ceux qui devaient en recevoir de lui, l’empereur, sur un rapport du ministre de la marine Decrès, révoqua la destination qui lui avait été assignée, et l’amiral Missiessy fut charge du commandement de ces flottilles. Pour dédommager Allemand de cette espèce de disgrâce, on le nomma grand officier de la Légion d’honneur. En 1814, il fut crée chevalier de St-Louis, puis admis à la retraite. Réintegré sur les listes de la marine en 1815, il fut une seconde fois mis à la retraite en 1816. Il passa encore quelques années à Paris, où il s’occupa beaucoup de la société du St-Sépulcre, dont il était trésorier. On sait que les décorations de cet ordre se distribuaient alors d’une manière très-abusive, et l’on accusa Allemand d’avoir pris une part intéressée à ces distributions. Retiré ensuite à Toulon, il y mourut le, 2 mars 1826, et fut enterré avec les honneurs dus à son grade. Il avait composé lui-même une notice sur sa vie qui, selon ses dernières volontés, a été gravée sur sa tombe, et dans laquelle on pense bien qu’il avait apprécié ses exploits au moins à leur valeur. Peu d’officiers ont parcouru une carrière maritime plus active : l’état de ses services présente un total de 445 mois, dont 318 sous voiles, il exerça neuf commandements généraux, remplit dix-huit missions, et assista à dix-sept combats. Sa vie militaire offre des circonstances heureuses, mais on n’y remarque aucun de ces faits qui prouvent le génie ou les talents nécessaires aux grandes opérations. Altier, frondeur, et méconnaissant toute autorité supérieure, il abusait constamment de celle qui lui était confiée, au point que tous les officiers regardaient comme une défaveur d’être employés sous ses ordres. H-q-n.


ALLEMANT. Voyez. Lallemant.


ALLEN (Guillaume). Voyez. Alan.


ALLEN (Thomas), mathématicien anglais, né en 1542, à Utoxeter, dans le Staffordshire, étudia dans le collège de la Trinité, à Oxford. Le comte de Northumberland, protecteur des mathématiciens, le reçut quelque temps chez lui, et le comte de Leicester lui offrit un évêché, qu’il refusa par amour pour la solitude et pour les travaux qu’il avait entrepris. Les connaissances d’Allen en mathématiques le firent considérer par le vulgaire ignorant comme un sorcier ; l’auteur d’un livre, intitulé : Republique de Leicester, l’accusa d’avoir employé la magie pour servir le comte de Leicester dans son projet d’épouser la reine Élisabeth, On ne doit pas s’arrêter à une imputation si absurde ; mais il est certain que le comte avait tant de confiance dans Allen, que rien d’important ne se faisait dans l’État sans que celui-ci en eût connaissance. Allen amassait, avec une persévérance infatigable, de vieux manuscrits concernant l’histoire, l’antiquité, l’astronomie, la philosophie et les mathématiques. Plusieurs auteurs les ont cités comme ayant formé la Bibliothèque Allenienne. Outre les collections précieuses que ce savant a laissées, on a de lui : 1° Ptolomei Pelusiensis de astrorum judiciis, aut, ut vulgo vocant, quadripartitæ constructionis, liber secundus, cum expositione Thomæ Alleyn, Angli Oxoniensis ; 2° Claudii Ptolomei de astrorum judiciis liber tertius, cum expositione Th. Alleyn. Il mourut en 1632, dans un âge très-avancé. Il est a regretté qu’un homme si estimé de

  1. Si l’on en croit les récits de Ste-Hélène, recueillis par le docteur O’Meara, Napoléon a dit que dans cette occasion son amiral s’était conduit conne un imbécile, qu’il avait donné le signal de sauve qui peut, et que l’amiral anglais aurait pu détruire toute l’escadre française. M-NJ.