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jours. Son portrait moral a été peints avec autant de vérité que de bonheur, par M. Pariact, à qui nous empruntons le passage suivant : « Doux avec les siens, inoffensif et serviable envers tous, jamais, une parole de haine, jamais un acte de vengeance, même la plus juste, ne lui est échappé. Pardonner, oublier les injures est le comble de la modération, et cette modération, il l’avait, même sans qu’il y songeât. Quelle tendresse il témoignait à ses malades ! et à quel point il a porté La bienfaisance ! Sa maison était le refuge des malheureux. On l’a vu nourrir à la fois deux ou trois serviteurs sans place, qui attendaient du travail. Une veuve sans fortune a trouvé dans sa maison, pendant vingt et années, un asile et du pain. Découvrait-il un artiste, quelque homme de lettres dans le dénuement, il leur faisait remettre, par des mains inconnues sous des noms supposés, des sommes considérables ; ou, s’il les obligeait directement, si, pour ménager leur fierté délicate, il consentait à recevoir des billets signés d’eux, ces billets étaient sur-le-champ ou jetés au feu, ou déchirés, froissés, mutilés, rendus nuls. » Ses ouvrages, nombreux, étendus et variés, sont : 1o  Dissertation sur les fièvres pernicieuses ataxiques intermittentes, Paris, 1779, in-8o. C’est le programme de la monographie qu’il a publiée plus tard sous le titre de : Traité des fièvres intermittentes pernicieuses, Paris, 1801, in-8o, et qui a eu quatre éditions, dont la dernière en 1819. Cet ouvrage a servi et sert encore de guide aux praticiens dans une branche de la pyrétologie qui est loin d’avoir fait des progrès comparables à ceux de quelques autres parties de la science des maladies aiguës. 2o  Description des maladies de la peau observées à l’hôpital St-Louis, et exposition des meilleures méthodes suivies pour leur traitement, Paris, 1806-1826, in-fol., avec cinq cents planches gravées et coloriées au pinceau. Peu de livres ont joui d’une plus grande célébrité que celui-là ; aucun autre traité sur le même sujet ne peut être mis en parallèle avec lui pour la beauté des figures, la fidélité des descriptions, le nombre et la vivacité d’un style plein d’images. Cependant il a le défaut de tous les ouvrages de luxe, celui d’être à portée d’un très-petit nombre de personnes, et par cela même il a exercé peu d’influence. On a reproché avec raison aux planches de ne représenter qu’une des périodes des inflammations dont elles sont destinées à donner l’indication, d’où il suit qu’elles ne sauraient procurer une idée exacte de maladies qui, dans leur évolution, parcourent des formes parfois très-différentes les unes, des autres. 3o  Éléments de thérapeutiques et de matière médicale, Paris, 1814, in-8o. Une cinquième édition a paru en 1826, en 3 volumes. Lorsqu’Alibert publia ce travail, il s’agissait de donner une base fixe et rationnelle à une étude obscurcie par d’éternelles divagations, et devenue l’arène stérile de l’esprit de secte. Le problème consistait à porter l’ordre et la lumière là où régnaient depuis des siècles l’arbitraire et la confusion. L’auteur en donna une solution fort heureuse pour l’époque. L’un des premiers il eut l’heureuse idée de porter le flambeau de la physiologie dans la thérapeutique ; malheureusement la saine physiologie ne faisait encore que de naître. Le traité de matière médicale a été beaucoup lu, parce que personne ne possédait à un plus haut degré qu’Alibert le talent d’éviter les détails arides et de rendre la science aimable ; mais il est peu connu aujourd’hui, car l’éclat d’un style élégant ne suffit pas pour sauver de l’oubli ; dans une science comme la médecine, qui ne saurait demeurer stationnaire, chaque nouveau venu trouvant incessamment à y récolter, parce que le fonds en est inépuisable. 4o  Précis théorique et pratique sur les maladies de la peau, Paris, 1810-1818 ; 2e  édition, 1822, 2 vol. in-8o. 5o  Éloges de Spallanzani, de Galvani et de Roussel, suivis d’un Discours sur les rapports de la médecine avec les sciences physiques et morales, Paris, 1806, in-8o. Ces quatre opuscules avaient déjà paru, le discours et les deux premiers éloges dans les Mémoires de la société médicale d’émulation ; l’éloge de Roussel, dans l’édition des œuvres de ce médecin. Les éloges d’Alibert sont à la fois des mémoires précieux pour servir a l’histoire des sciences, et des modèles qu’il serait difficile de surpasser. 6o  Physiologie des passions, ou nouvelle Doctrine des sentiments moraux, Paris, 1825, 2 vol. in-8o ; 3e  édition, 1837. Cet ouvrage est remarquable, en ce que l’auteur s’est attaché à peindre les passions non moins en physiologiste qu’en philosophe. Jadis Cureau de la Chambre, premier médecin de Louis XIII, avait tracé, mais d’un pinceau lourd et sans grâce, l’histoire des afflictions de l’âme, des sentiments moraux et des passions qui embellissent et tourmentent à la fois notre vie. Comme lui, Aliliert vivait sur le vaste théâtre des sentiments les plus opposés, des passions les plus actives, des affections les plus variées ; mais il avait de plus que, lui tous les trésors d’une philosophie plus épurée, d’une physiologie établie sur de meilleurs fondements, ou d’une plume aussi brillante que facile. Son livre n’épuise pas le sujet, assurément ; mais on y trouve une étude de l’homme moral faite sous un point de vue nouveau, et au moyen d’un ensemble de connaissances qui ne se rencontre guère hors de la médecine. L’auteur semble avoir été inspiré par cette pensée de Descartes, que, s’il y a un moyen de rendre les hommes meilleurs, c’est dans la médecine qu’il faut la chercher. Personne ne jugeait l’homme individuel avec autant de rapidité qu’Alibert ; mais, toujours plus indulgent et plus sage à mesure qu’il connaissait mieux l’humanité, s’il observait les faiblesses humaines, c’était pour les rattacher à des observations générales, et jamais pour tracer des portraits qui pussent ressembler à quelqu’un. 7o  Précis historique sur les eaux minérales les plus usitées en médecine, suivi de quelques renseignements sur les eaux minérales exotiques, Paris, 1826, in-8o. L’étude des eaux minérales est plus embarrassante que celle d’aucune autre puissance thérapeutique, à cause de la difficulté d’évaluer avec précision l’influence des divers agents physiques sur l’organisme humain, dans l’impuissante où l’on est de séparer chaque fait observé des causes qui lui sont étrangères. Tant de