Page:Michaud - Biographie universelle ancienne et moderne - 1843 - Tome 1.djvu/472

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
456
ALF

le plus grand maître de jurisprudence qui fût alors à Rome, que cet homme, dis-je, a été assez grave pour n’être pas lié avec les compagnons de débauche de Catulle, et n’être pas cité par lui comme un de ses contemporains. On ne peut pas non plus expliquer l’humeur d’Horace contre Alfenus :

Alfenus vafer, omni
Abjecto instrumento artis, clausaque taberas,
Sutor erat, sapiens operis sic optimus ommnis
Est opifex solut, sic rex.

Alfenus Varus n’était point rusé ; tous les historiens s’accordent à dire qu’il ne dut sa fortune qu’à son mérite, et le mettent au nombre des jurisconsultes les plus distingués de son siècle. Ses contemporains eurent pour lui une si haute estime, que ses funérailles furent célébrées aux dépens de la république. M-x.


ALFERGAN (Ahmed-ben-Kotsaïr), astronome arabe, fut nommé Alfergany, parce qu’il était né à Ferghanah, ville de la Sogdiane. Il excellait tellement dans les calculs astronomiques, qu’on lui donna le surnom de Hacib (calculateur). On ne peut déterminer d’une manière précise l’époque de sa naissance, ni celle de sa mort. On sait seulement qu’il vivait sous le règne du calife Al-Mamoun, mort en 833. Alfergan est auteur d’une Introduction à l’astronomie, divisée en 30 chapitres : c’est l’abrégé de l’astronomie grecque, qui commençait à se naturaliser chez les Arabes, vers le temps ou Alfergan parut. Le dénombrement des étoiles y est, comme dans l’Almageste, de 1022, et la précession, d’un degré en cent ans ; mais l’obliquité de l’écliptique n’y est que de 23 35′. Il existe de cet ouvrage trois traductions latines. La première, de Jean Hispalensis, faites dans le 12e siècle, imprimée à Ferrare en 1493, et réimprimée à Nuremberg en 1537, avec une préface de Mélanchthon ; la seconde, de Jean Christman, d’après une version hébraïque publiée à Francfort en 1590 ; la troisième a paru en 1669, in-4o ; elle est de Golius, qui l’a enrichie de notes savantes, que la mort ne lui a pas permis d’achever. Alfergan a encore composé deux autres ouvrages, l’un sur les cadrans solaires, l’autre sur la construction de l’astrolabe et son usage. Il en promettait un sur l’obliquité de l’écliptique, et sur la manière de l’observer chaque siècle ; mais ce traité ne nous est pas parvenu. Son Introduction à l’astronomie est fort superficielle ; elle ne renferme rien que ce qu’on fit partout, à l’exception des noms arabes de quelques étoiles, des domiciles de la lune, et de quelques idées très-inexactes sur les distances des planètes et des étoiles à la terre, et sur leurs diamètres. Il supposait que les orbites des planètes étaient disposées de manière que la plus petite distance, d’une planète quelconque était égale à la plus grande distance de la planète inférieure, et la plus grande distance, égale à la plus petite de la planète supérieure ; ainsi, toutes les orbites se touchaient, et l’orbite de Saturne touchait la sphère des étoiles fixes. D-L-e.


ALPES (Isaac), rabbin, né en Afrique, dans un village près de Fez, l’an 1013. Il était âgé de soixante-quinze È. ans, lorsqu’à la suite d’une querelle, Il fut obligé de se retirer en Espagne, et vint d’abord à Cordoue. Il ajouta, par sa doctrine, un nouvel éclat à l’académie de cette ville, et mourut à Lucène, en 1103, à l’âge de 90 ans. Ce fut la qu’il composa, sur le Talmud, un ouvrage qui en est l’abrégé très-exact ; les Juifs en font la plus grande estime, le consultent, l’étudient plus qu’aucun autre, et l’appellent le Petit Talmud. On en à fait un grand nombre d’éditions ; quelques-unes n’offrent que le texte seul ; mais on a joint des commentaires à la plupart ; la première, et la plus rare, est celle de Constantinople, 1509. Sabioneta en a donné une autre à Venise, 1552 ; c’est une des plus complètes et des plus estimées. D-t.


ALFIERI (Oger), d’Asti en Piémont, écrivit, au 13e siècle, une histoire ou chronique de sa patrie ; il y raconte brièvement les faits les plus mémorables des temps anciens, et s’étend un peu davantage sur les modernes, jusqu’à l’année 1294, sans s’attacher cependant à suivre rigoureusement l’ordre des temps. Cette chronique, que l’auteur dit avoir recueillie de chroniques plus anciennes, a été insérée dans la grande collection de Muratori, Script. rer. ital., vol. 11. Il est vraisemblable que cet Alfieri était un des ancêtres de l’homme célèbre qui fait le sujet de l’article suivant. G-é.


ALFIERI (Victor), poëte italien, qui a puissamment contribué, dans le 18e siècle, à soutenir l’honneur littéraire de sa patrie, et qui lui a même procuré une gloire nouvelle, en créant pour elle un genre de poésie qui lui manquait. Il a lui-même laissé des matériaux surabondants pour la partie historique de cet article, dans un ouvrage imprimé après sa mort, où il serait à désirer qu’il n’eût fait entrer que des faits dont sa mémoire et l’histoire littéraire pussent s’enrichir. Il naquit à Asti en Piémont, le 17 janvier 1749, de parents nobles, honnêtes et riches. Il n’avait pas encore un an lorsqu’il perdit son père, Antoine Alfieri. Il eut pour tuteur son oncle Pellegrino Alfieri, gouverneur de la ville de Coni. Cet oncle le fit entrer, en 1758, à l’académie ou collège des nobles, à Turin, où résidait la famille de sa mère, qui était de la maison de Tournon. Il y fut principalement confié aux soins du comte Benoit Alfieri, cousin de son père, qui était premier architecte du roi. Le jeune Alfieri n’avait fait que très-faiblement ses premières études. Il ne fit aucun progrès à l’académie. Des maladies dégoutantes, un caractère violent qu’elles aigrissaient, et les désagréments que ce caractère lui attirait, remplirent fort tristement les premiers moments de sa jeunesse. La mort de son tuteur l’ayant rendu totalement libre, et maître de sa fortune à seize ans, il sortit de l’académie, à peu près dans l’état d’ignorance où il y était entré, sans avoir pris aucun goût même aux exercices agréables, excepté à l’équitation. Sa première passion fut celle des voyages, mais sans aucun autre but que le mouvement et le changement de lieu. D’abord, en moins de deux ans, il parcourut une grande partie de l’Italie, vint à Paris, passa en Angleterre, séjourna en Hollande, et revint