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ALF

(Ihoa-él-o’loum) où il donne une notice et une définition précise de toutes les sciences et de tous les arts ; est ouvrage se trouve manuscrit à l’Escurial ; l’autre est un traité de musique très-célèbre, où il explique les sentiments des théoriciens, fait voir les progrès de, chacun d’eux, corrige leurs erreurs, et supplée à l’imperfection de leur doctrine. Dirigé par les lumières de la physique, il met dans tout son jour le ridicule de l’opinion des pythagoriciens sur les sons planétaires et l’harmonie céleste ; enfin, il prouve, par cette même physique, l’influence des vibrations de l’air sur les sons, et donne des règles certaines sur la forme et la construction des instruments. Il faut se reporter au temps où vivait Alfarabius pour apprécier ses principes. La plupart de ses ouvrages, dont Casiri nous a donne la nomenclature (Bibl. arab.-hips., t. 1er, p. 1re, pag. 190), existent en hébreu. C’est vraisemblablement d’après ces versions que les Européens ont connu les écrits d’Alfarabius. On a imprimé, 1o dans les Œuvres philosophiques d’Avicenne, publiées à Venise en 1495, son traité de Intelligentis ; 2o dans celles d’Aristote, avec les commentaires d’Averroës, son petit ouvrage de Causis ; 3o et enfin, à Paris, en 1638, ses Opuscula varia. J-n.


ALFARO Y GAMON (Juan d’), peintre, naquit à Cordoue, en 1640. Il reçut de Castille les premières leçons de son art, et acheva de l’étudier à Madrid, dans l’école de Vélasquez, dont il imita d’abord la manière, principalement dans les portraits. Ce dernier, étant premier peintre du roi d’Espagne, lui facilita les moyens de travailler d’après les tableaux qui décoraient les maisons royales. Alfaro étudia de préférence les admirables portraits du Titien, de Rubens et de van Dyck. Plsieurs de ses ouvrages, particulièrement ceux de petite proportion, se rapprochent de la manière facile et savante de ce dernier maître. Traitant avec supériorité, tant à l’huile qu’en miniature, le genre lucratif du portrait, Alfaro semblait devoir s’assurer par ses talents une existence agréable il n’en fut cependant pas ainsi. Palomino Velasco dit que des incommodités dont il avait été affligé dès sa jeunesse finirent par lui ôter les moyens de travailler, et que la mélancolie où il tomba le fit périr à l’âge de 40 ans. L’Anglais Richard Cumberland, qui a écrit, sous le titre d’anecdotes, etc., un ouvrage sur les plus célèbres peintres d’Espagne, attribue la mort d’Alfaro à une muse partirulière. Voici la substance de son récit, dont les détails ont un grand caractère de vérité, et peuvent d’ailleurs le concilier facilement avec ce que rapporte Palomino Velasco. Alfaro, s’étant lié d’une étroite amitié avec l’amiral de Castille, demeura dans sa maison jusqu’à l’époque où ce seigneur fut exilé. Désespéré de cet événement, l’artiste ne put plus supporter le séjour de Madrid, et en 1678, il se retira dans sa ville natale. Vers ce temps, un édit fixa les prix des tableaux : Aldaro, déjà malade du chagrin que lui causaient les malheurs de son ami, fut indigné d’un acte administratif si propre à décourager les artistes, et ne toucha plus à ses pinceaux, quoiqu’il eu acquis déjà une grande régularité, et qu’il fût dans la force de l’âge. Cet abandon de lui-même l’avait réduit à une grande détresse, lorsqu’il apprit que son ami était rentré en faveur. Il prit sur-le-champ la route de Madrid pour l’en féliciter, sans songer que ses facultés ne lui permettaient pas d’entreprendre un voyage long et pénible : il comptait sur l’hospitalité de ses compatriotes, et surtout des religieux, dont les demeures étaient toujours ouvertes aux voyageurs indigents. Arrivé enfin à Madrid, il se rendit à l’hôtel de l’amiral. Soit à cause de son extérieur misérable, soit pour tout autre motif, on lui refusa la porte, et, malgré sa persévérance, il ne put jamais parvenir à être admis en présence de celui qui l’avait autrefois aimé et protégé. Alfaro, profondément blessé de ce refus, et dénué de toutes ressources, ne trouva pas dans son caractère assez de force pour lutter contre ses infortunes, et mourut quelques jours après. Ainsi périt, en 1680, a l’âge de 40 ans, un des plus habiles peintres que l’Espagne ait produits. Non-seulement Alfaro fut un bon artiste, mais il écrivit encore sur son art avec succès. Palomino Velasco avoue que ses notices sur la vie du célèbre Velasquez, de Cespédes et de Becerra lui ont été très-utiles. Cordoue possède d’Alfaro une Incarnation ; Madrid, un Ange Gardien et un portrait de don Pedro Calderon de la Barca, placé au-dessus de son tombeau, dans l’église de San-Salvador. Ce dernier morceau doit surtout attirer l’attention, si, comme tout l’annonce, il représente l’un des plus fameux poêtes dramatiques de l’Espagne. D-t.


ALFÉNUS VARUS, jurisconsulte, célèbre à Rome, vers l’au 754 de la république. Il naquit à Crémone, d’un cordonnier, dont il quitta la boutique, jeune encore, pour venir étudier à Rome, sous Servius Sulpicius, dont il fut bientôt le meilleur disciple. Il y eut pour compagnon d’école Cælius Tubero. Alfenus Varus avait un jugement profond, des mœurs pures. Ces qualités, jointes à des connaissances très-étendues, lui acquirent une si grande réputation, qu’il parvint à la dignité de consul. C’est à lui qu’on doit les premières collections du droit civil, auxquelles il donna le nom de Digestes. Aulu-Gelle en parle comme d’un homme qui avait de grandes connaissances de l’antiquité, et le jurisconsulte Paulus a fait un abrégé des quarante livres de Digestes composés par Alfenus. Quelques auteurs ont confondu Alfenus Varus avec plusieurs autres personnages du même nom, qui ont vécu à peu près à la même époque. Dacier croit que c’est de ce jurisconsulte que parle Catulle, dans une de ses épigrammes, et Virgile, dans plusieurs de ses églogues ; le même savant pense que c’est, Alfenus que le poête de Mantoue eut l’obligation de ne pas voir ses partagées entre les soldats. Il serait possible, quoique la chose ne soit pas prouvée, que le consul Alfenus eût rendu ce service à Virgile ; mais il n’est certainement pas l’Alfenus cité par Catulle dans sa dixième épigramme. On doit croire, dit Bayle à ce sujet, qu’un homme qui s’appliqua à l’étude du droit avec tant d’ardeur, que non-seulement il effaça, par ses progrès, la honte du métier mécanique qu’il avait exercé à Crémone, mais qu’il succéda à Servius Sulpicius,