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les frais du libraire de Rouen, et anéantit tellement la critique, qu’il n’en est reste que deux exemplaires imparfaite, formés des feuilles qui se trouvaient chez les épiciers ; l’un fut mis dans la bibliothèque du premier président Pellot, et l’autre tomba entre les mains de M. de Manneville, chanoine de la cathédrale. L’ouvrage ayant paru dans le temps des demêlés du saint-siége avec la cour de France, au sujet de la régale et des quatre articles du clergé, on fut choqué à Rome de voir l’auteur s’y déclarer ouvertement pour les intérêts de la France. Innocent XI le proscrivit par un décret du 13 juillet 1684, ce qui ne l’empêcha pas de continuer son travail, et d’y ajouter, en 1689, l’histoire de l’Ancien Testament. Le tout a été réuni en 8 volumes in-fol., réimprimes en 1748, à Venise, par les soins du P. Mansi, augmentés de plusieurs lettres de l’auteur, de la réfutation des remarques de Basnage, et de savantes notes du théologien Constantin Roncaglia. Le P. Alexandre y réduit en abrégé, sous certains chefs principaux, ce qui s’est passé de plus considérable dans l’Église, et il discute, dans des dissertations particulières, les points contestés d’histoire, de chronologie, de critique, etc. ; le style en est facile, et le ton avec lequel il combat ses adversaires, sage et modeste. Comme son but principal était de fournir aux bacheliers en licence leurs matières toutes digérées, il suit, dans ses dissertations, la méthode scolastique, fatigante pour le commun des lecteurs, mais très-commode pour ceux que l’auteur avait en vue[1]. Cette histoire fut suivie, en 1693, d’une Théologie morale, selon l’ordre du Catéchisme du concile de Trente, dont la meilleure édition est celle de Paris, 1705, in-fol., 2 vol. ; et, peu de temps après, de ses Commentaires sur le Nouveau Testament, également en 2 vol. in-fol. Ce savant religieux est encore auteur de plusieurs autres écrits moins considérables. Ce sont des dissertations estimées, contre le P. Frassen, au sujet de la vulgate, contre Launoi, pour prouver que St. Thomas est auteur de la Somme théologique qui porte son nom ; contre les Bollandistes, pour revendiquer au même docteur l’office du St. Sacrement. Parmi ses autres écrits, qui firent du bruit dans le temps, il faut compter : 1° la Dénonciation du péché philosophique ; 2° des Lettres sur le Thomisme adressées aux jésuites, contre celles de leur P. Daniel, et qui ont été tronquées dans l’édition de Lyon, où elles sont réunies avec celles de son antagoniste : Louis XIV imposa silence aux deux partis ; 3° l’Apologie des dominicains missionnaires de la Chine ; 4° la Conformité des cérémonies chinoises avec l’idolâtrie des Grecs et des Romains. En louant le P. Alexandre d’avoir combattu fortement en toute occasion les maximes ultramontaines. par rapport à l’autorité qu’elles attribuent aux papes sur les princes, on ne peut lui pardonner de s’être déclaré avec la même force en faveur des princes qui ont employé le fer et le feu contre les Albigeois. Sa Défense de la million de St. Denys l’Aréopagite en France, dont tous les bons critiques étaient alors désabusés, fit peu d’honneur à son jugement, ainsi que celle de l’arrivée de Lazare en Provence. Peut-être y entra-t-il quelque intérêt de corps, pour maintenir la tradition des dominicains, qui prétendaient en posséder les reliques dans leur couvent de St-Maximin. On trouve la liste des autres opuscules d’Alexandre dans le tome 25 des Mémoires de Nicéron, et dans le 4° du Nécrologe des plus célèbres défenseurs de la foi. T-d.


ALEXANDRE (Nicolas), bénédictin de la congrégation de St-Maur, né à Paris, en 1654, d’une famille distinguée, et mort à St-Denis, en 1728, est connu par deux ouvrages : 1° la Médecine et la Chirurgie des pauvres, Paris, 1714, in-12 ; 2° Dictionnaire botanique et pharmaceutique, ibid., 1738, in-8o. Le premier renferme des remèdes choisis, peu coûteux, et faciles à préparer, pour les maladies internes et externes ; le deuxième expose les principales propriétés des minéraux, des végétaux et des animaux employés dans la médecine. On ne peut qu’applaudir aux intentions louables et au zèle de l’auteur ; mais la médecine a trop souvent à gémir de la confiance qu’inspirent à des gens peu instruits les connaissances puisées dans des ouvrages aussi incomplets. C. et A-n.


ALEXANDRE ou ALLERANDE[2] (Dom Jacques), connu par son Traité des horloges, naquit le 24 janvier 1653, à Orléans. Ayant embrassé la vie religieuse dans la congrégation de St-Maur, il partagea tous ses instants entre les devoirs de son état et la culture des sciences mathématiques. il mourut d’apoplexie le 25 juin 1734, à l’âge de 82 ans, dans le monastère de Bonne-Nouvelle, dont il avait rempli successivement les principaux emplois pendant plus de quarante années. On a de lui : 1° Traité du flux et du reflux de la mer, Paris, 1726, in-12. Il avait compose cet ouvrage depuis longtemps pour satisfaction personnelle, et sans avoir l’intention de le publier ; mais l’académie de Bordeaux ayant proposé pour sujet de prix la cause des marées, D. Alexandre lui adressa un extrait de son travail qui fut couronné. Sa théorie des marées repose sur un fait inexact : le mouvement de la terre autour de la lune. Plusieurs savants se sont occupés depuis de l’examen de ce phénomène. De toutes les explications qui en ont été données, la plus satisfaisante est celle que l’on doit à Laplace. (Voy. ce nom.) 2° Traité général des horloges, ibid., 1734, in-8o, fig. Dans cet ouvrage, qui n’est pas commun, l’auteur parle successivement des horloges solaires, des horloges à eau, des horloges à roues, et enfin des montres. On ne peut nier qu’il n’eut des connaissances très-étendues ; mais les progrès que l’horlogerie a faits depuis un siècle rendent à peu près inutile son ouvrage, qui, d’ailleurs, n’est pas exempt d’erreurs.

  1. Il paru à Venise, en 1778, 2 vol. in-fol, un Supplément à l’histoire ecclésiastique du P. Alexandre, qui mérite l’attention des savants et doit avoir place dans toutes les bibliothèques à la suite de cette histoire. On doit ce supplément à MM. François Borrani, Pierre Sandini, et surtout au savant P. Vincent Fassini, dominicain et professeur dans l’université de Pise.
  2. C’est ainsi que son nom est écrit à la tête de ses ouvrages ; mais l’autre orthographe semble avoir prévalu généralement.