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éditions ; la première fut publiée par Soncino, en 1486 ; quelques écrivains, cités par Wolfius, le traduisirent en latin. Dans les éditions les plus modernes, le 25e chapitre de la 3e partie, plus particulièrement dirigé contre les chrétiens, a été supprimé. D-t.


ALBOHAZEN. Voyez Alhazen.


ALBOIN, roi des Lombards, était fils d’Audouin, auquel il succéda en 561. Il régnait dans la Norique et la Pannonie, qui forment aujourd’hui l’Autriche, et partie de la Hongrie ; tandis que Cunimond, roi des Gépides, gouvernait la Dacie et la Sirmie, et que Baian ou Cagan, roi des Avares, achevait la conquête de la Moldavie et de la Valachie. Parsa mère Rodelinde, Alboin descendait du sang illustre des Amales, et d’une sœur de Théodoric. Il épousa en première noces Clodosvinde, fille de Clothaire, et sœur des quatre monarques entre lesquels la France était alors divisée. Narsès, général de Justinien, qui connaissait la vaillance des Lombards, rechercha son alliance, et obtint de lui des secours dans la guerre contre Totila. Une haine violente divisait les Lombards et les Gépides ; Alboin rechercha l’alliance des Avares, et, de concert avec eux, il attaqua Cunimond, dont le royaume se trouvait entre eux et lui. Cunimond, au lieu de s’opposer à l’invasion des Avares, vint offrir la bataille aux Lombards ; il fut défait en 566, périt de la main d’Alboin dans le combat, et son peuple fut détruit presque en entier. Cette victoire acquit à Alboin une grande réputation. Après la mort de Clodosvinde, il épousa Rosmonde, fille de Cunimond, qu’il avait trouvée au nombre des captives. L’entière défaite des Gépides fut, pour Alboin, comme le prélude de la conquête de l’Italie : elle rassembla autour de lui les guerriers des nations voisines. Narsès, qui avait soumis l’Italie à Justinien, offensé par une cour ingrate, chercha dans Alboin un vengeur. Lorsque ce vieux général apprit que l’impératrice Sophie le rappelait au palais de Constantinople pour filer avec le reste des ennuques : « Je lui filerai une toile, répondit-il, que sa vie entière ne suffira pas à user. » Il invita, en effet, Alboin à passer en Italie. Ce roi en connaissait le chemin : il y avait envoyé, à plusieurs reprises, des troupes auxiliaires à Narsès ; le rappel, et bientôt après, la mort de ce général lui en facilitaient la conquête. La nation lombarde régnait depuis quarante-deux ans en Pannonie, lorsqu’Alboin résolut, en 568, d’abandonner les pays soumis à sa domination, pour acquérir un nouveau royaume. Ses États s’étendaient des confins de la Sirmie à ceux du Tyrol, et comprenaient tout le pays situé entre le Danube et les Alpes ; mais ces provinces, dévastées par de longues guerres, et privées de cultivateurs, ne pouvaient suffire à nourrir une nation qui voulait combattre et non travailler. Alboin appela sous ses étendards tous les braves des pays qui lui étaient soumis, et un grand nombre d’aventuriers des peuples voisins, non moins avides que lui de guerres nouvelles. 20,000 Saxons se joignirent à ses Lombards ; les femmes et les enfants suivirent leurs maris à la guerre, et une nation plutôt qu’une armée inonda l’Italie, abandonant aux Avares, ses anciens alliés, la plus grande partie de la Pannonie. Dès la première année de son entrée en Italie, Alboin conquit la Vénétie, à la réserve de Padoue et de Monselice, et il institua des lors le premier duché lombard, ou du Frioul, en faveur de Gizolfe, son neveu. Dans l’année suivante, en 569, Alboin soumit tout le pays entre les Apennins et les Alpes, à la réserve de Pavie et de Crémone. En 570, il étendit ses conquêtes dans l’Émilie et la Toscane, et un de ses généraux nommé Zotton, pénétrant au midi de l’Italie, fonda, en 571, le duché de Bénévent. On ne voit pas qu’aucune grande bataille ait été livrée par les Grecs pour défendre l’Italie ; mais plusieurs villes soutinrent des siéges obstinés, et la conquête des Lombards n’eut point la rapidité des autres invasions de barbares. Pavie se rendit enfin en 572, après un siége de plus de trois ans. Alboin, irrité contre ses habitants, avait résolu de les faire tous passer au fil de l’épée ; mais on assure que la chute de son cheval à la porte de la ville, chute attribuée à un miracle, lui fit révoquer ce vœu sanguinaire, et que son cheval se releva dès qu’il eut prononcé la grâce des Pavisans. Comme Pavie était alors. une ville forte et très-avantageusement située, Alboin et ses successeurs en firent le lieu de leur résidence, et la capitale du royaume des Lombards. Borné par le duché de Rome, l’exarchat de Ravenne, les lacunes de Venise et les Alpes, ce royaume acquit dés lors l’extension qu’il devait garder jusqu’à sa fin. Alboin, après avoir régné 3 ans et demi en Italie, fut massacré le 28 juin 573, à Vérone, par un assassin qu’avait armé sa femme Rosmonde. Dans l’ivresse d’un festin, il avait envoyé à cette princesse une coupe faite avec le crane de Cunimond, roi des Gépides, son père, et l’avait invitée à boire elle-même, disait-il, avec l’auteur de jours. Rosmonde, déterminée à se venger par un forfait de cette insulte féroce, engagea dans une conjuration Almichilde, noble lombard, qui pouvait retendre au trône. et lui assura les secours des Gépides ; mais Almichilde n’osait point combattre Alboin, le plus vaillant et le plus vigoureux guerrier des armées. Rosmonde choisit parmi les simples soldats un homme renommé pour sa force extraordinaire, et, ne pouvant le séduire autrement, elle prit la place d’une de ses femmes dont ce soldat, nommé Péridée, était amoureux. Après un rendez·vous nocturne, elle se fit connaître à lui, et ne lui laissa plus que le choix de périr dans d’affreux supplice, victime de la jalousie d’Alboin, eu de servir sa vengeance. Elle l’introduisit dans l’appartement du roi, comme celui-ci dormait après le repas ; elle avait eu soin d’en tirer toutes les armes, excepté une épée, qu’elle avait fortement liée au fourreau. Alboin, réveillé par les coups que lui portait l’assassin, voulut vainement tirer cette épée ; il saisit ensuite une escabelle, avec laquelle il se défendit quelque temps ; mais, affaibli par le sang qu’il perdait, il tomba enfin sans vie. Les assassins, qui s’enfuirent à Ravenne, périrent tous ensuite misérablement ; Almichilde fut empoisonné par Rosmonde, à qui il fit partager la coupe qu’elle lui avait donnée. Péridée fut aveugle à Constantinople. S. S-i.