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famille noble et si ancienne, que l’Ammirato, voulant relever la noblesse des Goncini, leur donne la même origine qu’aux Alberti. Il reçut une excellente éducation ; à l’âge de vingt ans, il composa une comédie intitulée Philodoxios, dans laquelle il avait si bien imité le style des anciens, qu’Alde Manuce le jeune y fut trompé, et la fit imprimer comme ouvrage original, sous ce titre : Lepidi comici veteris Philodoxios, fabula et antiquitate cruta ab Aldo Manuccio, Lucques, 1588, in-8o ; Alde ne fut qu’éditeur. Alberti entra dans les ordres pour se livrer à l’étude avec moins de distraction. En 1447, il était chanoine de la métropole de Florence et abbé de St-Savino, ou de St-Ermète de Pise. Littérateur, peintre, sculpteur et architecte tout à la fois, c’est par ses ouvrages d’architecture qu’il s’est particulièrement immortalisé. On doit le regarder comme l’un des restaurateurs de cet art, dont il possédait également la théorie et la pratique, et à la perfection duquel il contribua par ses travaux autant que par ses écrits. Succédant aux entreprises de Brunnelleschi, il mit dans son style plus de grâce et de finesse que son prédécesseur : il avait puisé ces avantages dans l’étude approfondie des monuments antiques, qu’il avait été mesurer lui-même à Rome et dans diverses parties de l’Italie. Alberti a laissé des preuves multipliées de son talent. À Florence, il acheva le palais Pitti, et bâtit le palais Ruccellai, la chapelle de cette famille dans l’église de St-Pancrace, la façade de l’église de Santa-Laria Novella, et le chœur de l’église de la Nunziata. Appelé à Rome par Nicolas V, il fut employé à réparer l’aqueduc de l’Aqua Vergine, et à élever la fontaine de Trévi, où l’eau de cet aqueduc vient aboutir ; mais il ne reste plus rien de cet ouvrage, la fontaine ayant été refaite par Clément XII, sur les dessins de Nicolas Salvi. Alberti proposa de couvrir d’un portique le pont St-Ange, projet dont la mort du pontife empêcha l’exécution. À Mantoue, il construisit, par les ordres de Louis de Gonzague. divers édifices, parmi lesquels on distingue l’église de St-Sébastien, et surtout celle de St·André, qui, par la grandeur et la beauté de ses proportions, a mérité de servir de modèle à beaucoup d’autres églises. Enfin, à Rimini, il a mis le comble à sa gloire, par la construction de l’église de San-Francesco, qui passe à juste titre pour son chef-d’œuvre. Comme écrivain, Alberti ne mérite pas moins de considération : il était versé dans la philosophie, les mathématiques, la connaissance de l’antiquité et la poésie : il était de la société intime de Laurent de Médicis. Parmi ses ouvrages de morale, composés en latin, on distingue son dialogue intitulé Momus, ou de Principe, dont on fit à Rome deux éditions dans la même année, 1520 ; un autre ouvrage, Trivia, sive de causis senatoriis, etc., Basileæ, 1538, in-4o, eut aussi beaucoup de succès. Cosimo Bartoli, qui a traduit en italien la plupart des écrits d’Alberti, a fait, on ne sait pourquoi, de son traité de Jure, ou de l’administration de la justice, les 5e et 6e livres du Momus. Alberti composa, en outre, un livre de cent fables ou apologues, un traité sur la vie et les mœurs (costumi) de son chien, un autre sur la mouche, et son Hecatomphile, poëme en prose sur l’art d’aimer, traduit en italien par Bartoli, en 1568 ; en français, en 1534 et 1584 ; enfin inséré, e, 1783 das mes Mélanges de littérature étrangère. Il existe plusieurs autres ouvrages d’Alberti sur la philosophie, les mathématiques, la perspective et l’étude de l’antiquité ; il composa même des poésies italiennes dans lesquels il voulut introduire le rythme latin ; mais cet essai ne réussit pas. Ses écrits sur les arts sont les plus estimés ; il composa d’abord son traité sur la sculpture ; della Statua, qui fut suivi du traité sur la peinture, en trois livres, remarquable par la pureté de la diction et l’importance des préceptes : de Pictura, prœstantissima et nunquam satis laudata arte, etc. Basileæ, 1540, aussi imprimé à Leyde, par les Elzévirs, à la suite du Vitruve, en 1649. Le dernier et le plus estimé des ouvrages d’Alberti est son traité d’architecture : de Re ædificatiora, en 10 livres, trop peu connu des artistes, le seul cependant que les modernes puissent mettre en parallèle avec celui de Vitruve. Il ne fut publié qu’après la mort d’Alberti, en 1485, à Florence, par Bernard son frère, qui le dédia à Laurent de Médicis, suivant les intentions de l’auteur. Cet ouvrage fut traduit en italien par Pierre Lauro, à Venise, en 1549, et, en 1550, par Cosimo Bartoli, qui l’orna de dessins gravés en bois qui manquaient à l’édition originale. Giacomo Léoni, architecte vénitien, en a publié une très-belle édition à Londres, en 1726, avec des gravures en taille-douce ; et la dernière édition, où sont réunis les trois traités sur les arts du dessin, est de Bologne, 1782, in-fol. Bartoli traduisit aussi les traités sur la peinture et la sculpture, et les fit imprimer en 1568 avec d’autres opuscules d’Alberti. On connait une autre traduction du traité de la peinture, par Domenichi 1547. L’édition de Paris, 1512, in-4o, est estimée. Il paraît d’abord surprenant qu’Alberti ait eu assez de loisir pour embrasser tant de genres différents, mais les heures qu’il donnait au travail étaient distribuées de manière qu’il ne lui en restaient aucune pour l’amusement, on pourrait presque dire, pour le repos. Les qualités de son âme répondaient à ses talents ; aimable, généreux, ne donnant aucun ombrage aux autres artistes, parce qu’il ne leur disputait aucuns profits, Alberti vécut paisiblement, entouré de la considération due à son mérite, et mourut en 1475, dans sa patrie, à un âge très-avancé. On voit la sépulture de sa famille dans l’église de Ste-Croix. Sa vie a été écrite par Pozzetti, Florence, 1739, in-4o. C-n.


ALBERTI (Aristotile), architecte et ingénieur, connu aussi sous le nom de Ridolfo Fioraventi, né à Bologne, fut un des plus grands mécaniciens du 15e siècle ; on a peine à croire les merveilles qu’on lui attribue. Ce fut lui, dit-on, qui, en 1455, transporta tout d’une pièce sur des rouleaux, à une distance de 35 pieds, le campanile de Ste-Marie, garni de ses cloches. Chose non moins sureprenante, il redressa un autre clocher, qui penchait de 5 pieds et demi. Cet homme extraordinaire alla en Hongrie, reconstruisit plusieurs ponts sur le Danube, et fit