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çut la moindre atteinte. En 1548, alber était prédicateur à Magdebourg ; le refus qu’il fit d’accéder à l’Intérim proposé par Charles-Quint aux protestants le força de s’en éloigner ; il vécut dans la retraite à Hambourg, jusqu’en 1553 ; alors il fut nommé surintendant général à Neubrandebourg, dans le Mecklenbourg, où il mourut le 3 mai de la même année. Son principal ouvrage est l’Alcoran des Cordeliers, traduit en français, à Genève, par Conrad Badius, sous ce titre : L’Alcoran des Cordeliers, tant en latin qu’en français, c’est-à-dire la mer des blasphèmes et mensonges de cet idole stigmatisé qu’on appelle St. François, recueilli par le docteur M. Luther, du livre des conformités de ce beau St. François, imprimé à Milan, en 1510, et nouvellement traduit à Genève, par Conrad Badius, 1556. Alber n’avait effectivement fait qu’extraire et traduire en allemand le fameux ouvrage de Barthélemy Albizzi, de Pise (voy. Albizzi), intitulé : Liber conformitatum S. Francisci ad vitam Jesu Christi, où la vie et les miracles de St. François sont représentés comme fort supérieurs à ceux de Jésus-Christ. Luther ajouta une préface au livre de son ami ; et, comme Alber n’avait pas mis son nom sur le titre, Conrad Badius attribua l’ouvrage entier à Luther, et y ajouta, tant en marge qu’en notes, des passages assez plaisants. Cette traduction a eu plusieurs éditions : 4e parut à Amsterdam en 1734, avec des gravures de Bernard Picart, 3 vol. in-12 ; le 3e se compose de la Légende dorée, ou Sommaire de l’histoire des frères mendiants de l’ordre de St. François (par Nic. Vignier, le fils). Alber a écrit des traités théologiques et quarante-neuf fables intitulées : le Livre de la sagesse et de la vertu, Francfort-sur-le-Mein, 1579, in-8o, en vers allemands. La tournure satirique de son esprit perce dans tous ses ouvrages. G-t.


ALBERGATI (Nicolas), cardinal, né à Bologne en 1575. Sa famille, l’une des premières de la ville, le voulait faire jurisconsulte ; mais une vocation ardente le jeta, à vingt ans, dans les ordres sacrés ; il revêtit l’habit des chartreux, et s’acquit bientôt une réputation de sagesse et de science qui le conduisit rapidement aux plus hautes dignités. En 1417, le pape Martin V, dont l’élection venait d’apaiser les troubles intérieurs de l’Église, voulut employer l’influence d’Albergati sur ses compatriotes à les ramener sous l’autorité temporelle du pontife dont ils s’étaient affranchis. Albergati, sincèrement dévoué au saint-siége, fut nommé évêque de Bologne ; il put alors exposer ouvertement ses doctrines en faveur de la domination absolue du pape. Pendant longtemps la vénération dont ce prélat était l’objet balança le mécontentement que ses tendances inspiraient aux Bolonais ; mais, en 1420, une révolte éclata, et il faillit être assassiné. Le pape vint à son secours, et, pour laisser aux esprits le temps de se calmer, l’envoya en France comme nonce apostolique. Sa mission avait pour but un accommodement entre Charles VI et le roi d’Angleterre Henri V, mais elle fut rendue sans objet par la mort des deux princes (1422). En 1426, Albergati reçut le titre de cardinal de Ste-Croix de Jérusalem ; son zèle s’en accrut encore, et ce zèle, souvent exagéré, fut la cause immédiate d’un nouveau soulèvement des Bolonais, plus redoutable que le premier, car le palais épiscopal fut pillé, et, de leur propre autorité, les habitants élirent un autre évêque. Le cardinal se réfugia auprès du saint-père, qui le retint deux ans à Rome ; une nouvelle ambassade en France lui fut ensuite donnée. En 1451, Eugène IV, successeur de Martin, envoya Albergati présider le concile de Bâle ; mais la, des difficultés imprévues se présenteront : Albergati soutenant que le concile empiétait sur le pouvoir du pape, et le concile, de son côté, se plaignant des mesures prises par Albergati, et qui n’allaient pas moins qu’à la négation de l’autorité du concile lui-même, un nouveau schisme faillit éclater, et le cardinal de Ste-Croix revint à Rome sans avoir pu accomplir sa mission. Alors le pape lui adjoignit trois cardinaux, et les quatre prélats dirigèrent de concert la 17e session, qui eut lieu à Bâle, en 1433. Cette fois, le concile se débarrassa de l’opiniâtre Albergati en le chargeant d’un insignifiant message pour Eugène IV. Il ne se tint pas pour battu, et nous le retrouvons à Bâle le 14 avril 1436, faisant l’ouverture de la 24e session. Toujours mêmes dissentiments, mêmes obstacles. Albergati reprend la route de Route, et obtient du pape, en 1451, une bulle qui transfère le concile de Bâle à Ferrare. Une partie des prélats obéirent, se constituèrent en synode à Ferrare le 10 janvier 1428, et tout ce qui avait été ou serait fait à Balle, depuis la bulle, fut déclaré nul de tout point. — L’Orient offrait alors un spectacle déplorable ; une catastrophe approchait a grands pas ; les Turcs s’étaient déjà montrés plusieurs fois devant Constantinople, qu’ils ne prirent cependant que quinze années plus tard. Dans cette situation désespérée, Jean Manuel Paléologue, l’avant-dernier empereur grec, se rendit en Italie, accompagné des hauts dignitaires de l’Église d’Orient, et proposa au pape Eugène la réunion définitive de l’Église grecque à l’Église latine : il espérait par la se donner pour auxiliaire contre les Turcs toute l’Europe catholique. Une session du concile fut employée, en octobre 1438, à discuter les principaux points de cette question, si souvent débattue et toujours ajournée. Cette fois encore, le concile, que présidait Albergati, se sépara sans rien conclure. L’année suivante, Albergati fut nommé successivement grand pénitencier de l’Église, puis trésorier du pape, en remplacement du cardinal des Ursins. Cette dernière fonction l’obligeait à une résidence habituelle auprès du saint-père. C’est en revenant avec lui de Florence, où la peste qui désolait Ferrare avait chassé le concile, qu’Albertgati, attaqué de la pierre depuis longues années, fut forcé de s’arrêter à Sienne, et y mourut le 9 mai 1443, âgé de 61 ans. Ce prélat joignait un caractère ferme et droit un esprit éclairé, laborieux, infatigable ; sa piété était sincère et profonde, mais il la poussait parfois jusqu’à l’intolérance. Thomas de Suzanne et Æneas-Sylvius, qui devinrent papes par la suite, sous les noms, l’un de Pie II, l’autre de Nicolas V, avaient été ses secrétaires. Il fut canonisé en 1745, par Benoit XIV, aux termes d’un