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tare qui a produit Djenguiz-Kan, Timour-Lank et Raber. Guerrier plein de valeur, réformateur hardi, administrateur habile Akbar occupa une large place dans les annales de son pays. Il est nécessaire pour bien apprécier l’importance réelle des conquêtes de cet homme extraordinaire, qu’on se rende un compte exact de l’Inde, à son avènement. Une esquisse rapide du règne de l’empereur Houmajoun sera pour nous une introduction naturelle à l’histoire de son fils Akbar. Houmajoun monta sur le trône en 1530, à la mort de Baber, son père, qui l’avait choisi pour successeur. Le nouvel empereur confia les provinces de Caboul, Lahore et Cashmir, à ses frères Shere-Shaw, Mirza-Camiran et Mirza-Hindal, dont il voulait s’assurer le concours. Mais à peine en possession de leurs gouvernements, ces princes s’en servirent comme d’un point d’appui pour renverser Houmajounn. Ils envahirent ses états, et le défirent plusieurs fois en bataille rangée. Presque tous les omrah (grand de l’empire) abandonnèrent alors l’empereur ; un d’eux lui refusa même le cheval qu’il demandait pour faciliter sa fuite. Après avoir couru des dangers inouïs, après avoir vu le petit nombre d’amis dévoués qui l’avaient accompagne mourir faute d’un peu d’eau dans les déserts de Guzarate, Houmajoun atteignit enfin la forteresse d’Amerkot, dans le soubah d’Adjemer. C’est là que, le dimanche 15 octobre 1542 (5 redjeb 949), la sultane Hamida-Banu Begum donna le jour à un prince qui fut nommé Akbar, c’est-à-dire grand. Toutes les espérances de l’empereur déchu s’étaient tournées du côte de la cour de Perse. Il partait pour en implorer le secours lorsqu’un omrah, du nom de Mohammed-Askhari, enleva par surprise Akbar et sa mère, et les amena prisonnier à Candahar. Houmajoun dut emporter dans l’exil cette nouvelle et amère douleur. À cette époque, le désordre était à son comble dans l’empire ; cent factions avides s’en disputaient les débris. Shere-Shaw, qui s’était proclamé empereur, n’en avait guère que le titre. Chaque rajah commandait en maître absolu dans la ville confiée à sa garde. Houmajoun, désespéré des lenteurs apportés par la Perse à l’exécution de ses promesse, assistait dans une inaction forcée au démembrement de ses plus riches provinces. Il put ainsi voir les omrah Patans, naguère subjugués par Baber au prix de tant de sanglants efforts, relever peu à peu la tête, et sous un chef habile nommé Secunder-Shaw, reconstituer l’empire des Patans. enfin en 1545, Houmajoun reparut à la tête d’une petite année persane qui, après quelques années, alla toujours se grossissant des mécontents de tous les partis. Bientôt il s’empare de Candahar, puis marcha sur Caboul. Le 10 ramadan 952 (15 novembre 1545), cette ville capitula. Houmajoun eut la joie d’y retrouver Akbar et la sultane sa mère. « Alors, dit Ferishta, prenant son enfant dans ses bras, il répéta ce verset : Joseph jeté dans un puits par ses frères, fut élevé par la Providence au comble de la gloire. » Pendant que l’empereur poursuivait d’un autre côté le cours de son succès ; Camiran attaqua Caboul et l’emporta d’assaut. Akbar retomba alors au pouvoir de oncle. Aussi rapide que son ennemi, Houmajoun reparait devant les murs de la place. la désertion commença parmi les assiégés ; deux chefs entre autres, Kirrache-Kan et Raboos-Beg, passent du côté d’Houmajoun ; alors l’atroce Camiran, dans un accès de rage, fait couper en morceaux les trois enfants de Raboos, et empaler entre deux créneaux le fils de Kirrache-Kan, Houmajoun, craignant tout pour son fils. Précipite l’assaut et reconquiert la ville. Successivement battu sur tous les points, Camiran se réfugia à la Mecque. ou il mourut en 1553. Mirza-Hindal, qui s’était réconcilié avec son frère Houmajoun. contribua puissamment à ses heureux résultats, que, malheureusement. il paya de sa vie. Resté en possession des richesses de Mirza-Hindal, Houmajoun les rendit sous forme de dot à la fille unique de celui-ci, et la donna pour épouse à Akbar. Quant au jeune prince il obtint le commandement des troupes de Hindal et le gouvernement de Ghizni. Il partit aussitôt pour cette ville, accompagné de son précepteur Djellal-el-din-Mammoud. À cette époque, Houmajoun avait enfin soumis tous les rebelles ; il crut le moment favorable pour reconquérir l’Indoustan. L’un des principaux omrah, Beyram-Chan-Chanan, reçut le commandement de l’armée ; l’empereur s’y rendit en personne, et fut bientôt rejoint par son fils. Le dernier jour de redjeb 962 (20 juin 1555), Akbar faisait une ronde autour du camp. Les Patans, voulant profiter de l’avantage que son inexpérience semble leur inspirer, le provoquent au combat : l’action commence ; Akbar fait des prodiges de valeur et en inspire à son armée. « Les Mogols semblaient avoir oublie qu’ils « étaient mortels. » Totalement battu, Secunder-Shaw chercha son salut dans la fuite ; et Houmajoun entra triomphant dans la ville de Delhi. Aboul-Mali fut ensuite nommé gouverneur du Pendjab ; mais, inhabile ou traitre, ce chef permit à Secunder-Shaw de regagner du terrain. Akbar et Beyram se remirent en campagne ; mais, à peine arrivés au Pendjab, ils apprirent que le 7 de rebyi 1er 963 (20 juin 1555), Houmajoun avait rendu le dernier soupir. Akbar fut proclamé empereur le 2 rebyi 2e 963 (15 juillet 1556). Il avait près de quatorze ans. Beyram-Chan devint alors régent, et réunit dans ses mains tous les pouvoirs de l’empire. Son premier soin fut de se concilier le peuple, en défendant toute espèce d’exaction, et en supprimant le péage des routes. De plus, il dispensa les laboureurs du servies militaire. Cependant ses occupations ne lui firent pas ralentir ses préparatifs contre Secunder-Shaw ; et bientôt Nagracot se rendit aux Mogols. Mais l’époque des pluies survint ; pendant qu’Akbar prenait ces quartiers d’hiver à Djallender, siliman-Mirza s’emparait de Caboul, et Himu, vizir de Mohammed-Adili, sehah du Bengale, envahissait l’empire. L’omrah Tirdi-Beg se laissa enlever Agra, Delhi et tout le Pendjab En apprenant ces désastres, Akbar fit mander Beyram : « Vous êtes mon espoir, lui dit-il, et ma conduite en ce jour vous doit prouver combien je prête peu l’oreille à de perfides insinuations, qui, je ne vous le cache pas, ont été dirigées contre vous. »