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44 avant J.-C., il marcha en Orient, où Hérode, roi de Judée, seconda ses armes qui furent partout victorieuses. Cette fois encore, il refusa le triomphe, et attribua tous ses succès à l’empereur, sous les auspices duquel il avait combattu. Auguste prolongea pour cinq ans son autorité tribunitienne, et l’envoya contre les Pannoniens qui, effrayés de son nom seul, se soumirent à toutes les conditions qu’il voulut leur imposer. Il était de retour en Italie, lorsqu’en traversant la Campanie, il fut attaqué d’une maladie violente, qui le mit au tombeau en peu de jours. À la première nouvelle de sa maladie, Auguste quitta les jeux auxquels il assistait, pour se rendre auprès de son ami ; mais il n’arriva que pour le pleurer. Sentant la perte qu’il venait de faire, il ordonna que le corps d’Agrippa fut transporté à Rome, se chargea de prononcer lui-même son oraison funèbre, et fit déposer ses restes dans son propre mausolée, près de ceux de Marcellus, l’an 742 de Rome, 12 avant J.-C. Agrippa mourut à 51 ans. Il légua au peuple romain ses biens et ses jardins. Parmi les dons qu’il fit à Auguste, on remarque celui de la Chersonèse taurique ; mais on n’a pu savoir comment il avait eu la souveraineté de ce pays. Agrippa laissa, de sa première femme, Cæcilia Attica, fille d’Atticus, une fille nommée Agrippine, qui épousa Tibère. Il n’eut point d’enfants de Marcella, sa seconde femme. Julie, qui fut la troisième, lui donna trois fils, Caïus, Lucius, Agrippa Posthumius, et deux filles, Julie et Agrippine, femme de Germanicus. Agrippa, comme on l’a dit, avait été plusieurs fois tribun ; les faisceaux consulaires lui avaient été décernés trois fois, et il avait exercé une fois la censure avec Auguste. D-t.


AGRIPPA (Marcus Julius), troisième fils du précédent et de Julie. Le surnom de Posthume lui fut donné parce qu’il naquit après la mort de son père, 12 ans avant J.-C. Il était d’un naturel grossier et sans culture, fier de sa force corporelle ; mais il n’était point connu par des vices. Auguste, son aïeul, l’adopta après la mort de ses frères, Caïus et Lucius César, en même temps qu’il adoptait Tibère ; mais il révoqua bientôt cette adoption, et relégua Agrippa dans l’ile de Planasie. Quelques auteurs assurent que ce fut à cause de la vie scandaleuse qu’il menait ; mais Tacite attribue la disgrâce d’Agrippa aux artifices de Livie, qui désirait écarter le seul homme qui pût porter obstacle à la grandeur de son fils Tibère. Cet empereur commença son règne par le meurtre du jeune Agrippa, qu’il fit assassiner par un tribut militaire, avant même que la mort d’Auguste fût publiquement connue, et ensuite, feignant de n’avoir point donné cet ordre, il voulut l’attribuer à Auguste mourant. Personne ne s’y trompe. Quoique le tribun militaire chargé de commettre ce crime fût un homme robuste et qu’il attaquât Agrippa désarmé, il eut beaucoup de peine à lui donner la mort. La postérité mâle d’Auguste s’éteignit avec Agrippa, qui périt ainsi malheureusement à 26 ans. Dans la suite, un des esclaves d’Agrippa, nomme Clément, forma un projet très-hardi. Il n’avait pu parvenir à l’enlever de l’île de Planasie, lors de la mort d’Auguste, et à le présenter aux armées de Germanie ; il résolut, à la faveur de quelque ressemblance, de se faire passer pour lui ; et étant débarqué à Cosa en Étrurie, il fit répandre le bruit qu’Agrippa n’était pas mort. Ses démarches mystérieuses accréditèrent ce bruit : il fut accueilli par la foule au port d’Ostie, et des assemblées secrètes se formèrent dans Rome même. Enfin, deux émissaires de Tibère étant parvenus à gagner sa confiance, se saisirent de lui, et le firent conduire à l’empereur. Quand ce prince le vit, il lui demanda « comment il était devenu « Agrippa ? » Clément eut l’audace de lui répondre : « De même que tu es devenu César. » Comme on présumait qu’un grand nombre de personnages distingués l’avaient aidé de leur argent et de leurs conseils, Tibère le fit mourir secrètement dans l’intérieur du palais, et aucunes recherches ne furent faites pour découvrir des complices que Clément avait en le courage de ne pas révéler. Q. R-y.


AGRIPPA (Hérode), roi de Judée, fils d’Aristobule et de Bérénice, fille d’Hérode, dit le Grand, fut élevé à la cour d’Auguste, avec Drusus, fils de Tibère. Son goût pour la profusion le jeta dans des dépenses si excessives, qu’à la mort de Drusus, il fut obligé de revenir en Judée. Il passa quelques années en un château de l’Idumée, dans une situation si misérable, qu’il se serait volontairement laissé mourir de faim, si sa femme Cypres, fille de Phasaël, et quelques-uns de ses amis ne fussent parvenus à lui rendre le courage. Il revint à Rome, où il s’attacha à Caligula, et eut l’imprudence de faire connaître le désir qu’il avait de la mort de Tibère. Cet empereur le fit aussitôt charger de chaînes ; mais il ne porta pas plus loin son ressentiment ; et Hérode Agrippa vivait encore lorsque Caligula parvint à l’empire. Ce prince le fit sur-le-champ mettre en liberté, et lui donna une chaîne d’or du même poids que celle de fer qu’il avait portée, avec le titre de roi, auquel il joignit deux tétrarchies. Un an après, Agrippa partit pour visiter son royaume. Prenant sa route par Alexandrie, il fit dans cette ville une entrée si pompeuse, qu’il excita l’envie des habitants, qui, toujours enclins à la raillerie, l’insultèrent par une procession satirique, ou un mendiant faisait le personnage d’un roi juif. Agrippa et ses, compatriotes, qui étaient en grand nombre dans la ville, furent très-offensés de cette insulte, dont ils ne purent tirer vengeance, parce que Flaccus, gouverneur de la ville, n’aimait pas les Juifs. Il s’ensuivit dans Alexandrie une persécution violente contre ces derniers ; mais Agrippa, en ayant informé l’empereur, obtint le rappel et la perte de Flaccus. Cependant Hérode Antipas, qui avait épousé, la sœur d’Agrippa, voyant avec envie son élévation, fit un voyage à Rome pour obtenir de semblables honneurs ; Agrippa l’accusa d’avoir pris part à la conjuration de Séjan, le fit bannir, et fut mis en possession de sa tétrarchie et de tous ses trésors. Agrippa se vit ensuite placé dans une situation critique a l’égard de Caligula. Ce tyran avait ordonné que son image fût adorée dans le sanctuaire même du temple de Jérusalem ; mais les Juifs s’op-