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cousin Rambaud d’Adhémar, prince d’Orange, fut tué au siége de cette ville. M-d.


ADHÉMAR ou AZEMAR (Guillaume), troubadour du 12e et non du 13e siècle, comme le prétend à tort l’abbé Millot, naquit au château de Marveys ou Marveil (Marvejols sans doute), en Gévaudan. On ne sait pas très-bien l’époque de sa naissance. Son père, qui était, à ce que l’on croit, un gentilhomme du nom de Gérard, avait obtenu à titre de fief, de l’empereur Frédéric Ier, le château de Grésignan ou Grignan, devenu depuis le berceau des Grignan, dont l’un des chefs épousa une demoiselle de Sévigné. C’est ce qui explique comment madame de Sévigné pouvait se croire une descendante des Adhémar. Celui dont nous racontons la vie fut un de ces troubadours dont, à cette époque, le caractère n’avait pas encore reçu d’altération sensible, bien qu’alors déjà il ne résidait plus uniquement dans les mœurs, et qu’il commençât à passer à l’état de convention, de théorie, indice certain de la transformation plus ou moins prochaine d’une société. — Comme Bertrand de Born et d’autres, mais avec moins d’éclat, Adhémar fut à la fois guerrier et poëte. Après avoir été, comme son père, l’objet des bienfaits de l’Empereur, il passa au service du comte de Provence (sans doute Alphonse Ier), qui l’arma chevalier. Néanmoins il ne parait pas que son état de fortune lui permit de faire brillante figure ; et peut-être cette circonstance lui devint-elle funeste ; car, bien qu’il fût aimé de la comtesse de Die, poëte comme lui, et dont il disait discrètement les vers sans en faire connaître l’auteur, il lui arriva cependant un jour de douter des sentiments de sa noble maîtresse, et de croire qu’elle lui préférait un rival plus puissant, le comte d’Embrun, qu’elle allait, disait-on, épouser. Le coup fut terrible pour le jeune troubadour : il ne le supporta point, et la douleur le conduisit rapidement aux portes du tombeau. La comtesse, avertie trop tard, vint avec sa mère visiter celui qu’elle n’avait pas cessé d’aimer. Elle tendit au mourant une main sur laquelle il exhala, avec un baiser, son dernier souffle. Son amante lui demeura fidèle : elle se retira dans le monastère de St-Honoré de Tarascon, s’y fit religieuse, et, minée par le chagrin, succomba à son tour quelques années après. On peut placer la mort d’Adhémar vers 1190. Ste-Palaye donne quelques-unes de ses chansons. Nous avons tout lieu de croire, à n’en juger que par le style, que celle que donne l’Histoire des troubadours n’est pas d’Adhémar. Il composa en outre un Catalogue des dames illustres, dédié à l’impératrice Béatrix de Bourgogne, femme de Frédéric Ier, mais ce livre ne s’est pas retrouvé. La Croix du Maine attribue encore à Adhémar plusieurs comédies. Des comédies à cette époque, et dans l’état ou se trouvait alors la France, sont chose vraisemblable ; mais peut-être bien des jeux-parties ou dialogues, fort en usage dans le monde des troubadours. Nous croirons plutôt, avec Nostradamus, aux droits d’Adhémar à un autre titre, celui d’inventeur d’un jeu où les assistants se parlaient a l’oreille. Un tel jeu, ajoute gravement Nostradamus, était singulièrement propre aux confidences d’amour. V. R-d.


ADHÉMAR de Monteil, né en Languedoc, de la même famille que le précédent, fut doyen du chapitre de Toul, puis évêque de Metz en 1327. Ce prélat fut un de ces ecclésiastiques qui ont pensé que le glaive n’est point déplacé dans les mains des ministres d’une religion de paix. L’humeur belliqueuse qu’il tenait de ses aïeux, et qu’il sembla léguer à plusieurs de ses successeurs, l’entraîna a commettre des actes d’hostilité contre les possessions de Raoul duc de Lorraine (1340), l’un des plus vaillants guerriers de ce temps. Le sort des armes fut incertain pendant plus d’une année, jusqu’à ce qu’un traité de paix vint suspendre leurs divisions. La guerre éclata de nouveau entre eux, lorsque Isabelle d’Autriche, régente de Lorraine, fit bâtir, près d’Amclécourt (au lieu ou s’est élevée depuis la ville de Château-Salins), une forteresse qui, dominant les frontières du pays Messin, semblait menacer la puissance de l’évêque souverain. Adhémar irrité vint mettre le siége devant ce-château. N’ayant pu le réduire, il se vengea en portant le fer et la flamme jusque sous les murs de Nancy. Enivré de ces succès, il marcha à la rencontre d’une armée que la régente avait rassemblée à la hâte. Mais cette fois la fortune l’abandonna ; il fut mis en déroute, et laissa 2,000 hommes sur le champ de bataille. Le duc Raoul, qui pendant ce temps avait fait la guerre en Bretagne, étant revenu, fit lever le siége de Château-Salins, et poursuivit jusqu’à St-Avold l’évêque Adhémar, qui reprit ensuite l’avantage, et gagna une bataille où le duc courut de grands dangers, Le roi Philippe de Valois, qui avait trouvé dans Raoul un puissant auxiliaire, interposa ses bons offices pour faire cesser une guerre dont l’issue ne pouvait être que funeste aux deux États. La paix ayant été conclue par cette puissante intervention, l’évêque de Metz fit édifier sur son territoire, à l’opposite de Château-Salins, un fort qu’il appela Beaurepaire. Plus tard, Adhémar, n’ayant pu se procurer les sommes qu’il s’était obligé d’acquitter, engagea cette forteresse à la duchesse de Blois, devenue régente après la mort de Raoul à la bataille de Crécy. Une fois nantie de ce gage, elle ne voulut plus s’en dessaisir. Adhémar, indigné de ce manque de foi, rassembla toutes ses forces, vint assiéger Château-Salins, s’en empara, et le détruisit de fond en comble, ainsi que plusieurs autres forteresses appartenant à la maison de Lorraine. Moréri commet une erreur en faisant renverser par Adhémar la ville de Salins, en Franche-Comté, qu’il a confondue avec Château-Salins. L’évêque de Metz eut bientôt à soutenir une autre querelle : les troupes de Robert, duc de Bar, avaient maltraité quelques-uns de ses soldats ; n’ayant pu obtenir réparation, il envahit le Barrois, prit Conflans, et se fit justice par la force des armes. Pour supporter le poids de tant de guerres, ce prélat avait été obligé de recourir à la voie des emprunts. Il engagea des terres considérables du temporel de son siége, entre autres les villes de Neuviller et de Sarrebourg, la châtellenie de Turquestein, etc. Ces occupations belliqueuses ne le détournèrent pas en-