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bras n’agissent que lorsque la pensée est mûre. Diderot fut le précurseur de Marat, comme le baron d’Holbach l’avait été de Chaumette, et J.-J. Rousseau de Rohespierre. Quand toute une génération récitait les vers de la tragédie de Brutus par Voltaire, quoi de plus simple qu’on en conclût classiquement au régicide ? Pour les puritains et les têtes rondes, rien de plus légitime que l’échafaud de Charles Ier. A qui doit-on reprocher ces anomalies ? La faute en est toujours aux pouvoirs qui laissent grandir et triompher les fausses opinions. — Thibaudeau naquit à Poitiers, en 1767, fils d’un avocat distingué, député aux états généraux (Voy. l’article qui précède). Son éducation, confiée aux oratoriens, fut toute classique ; l’oratoire faisait des Romains et des citoyens d’une république en France et sous la monarchie de Louis XVI. Le jour de l’expulsion des jésuites, l’éducation des jeunes gens, confiée aux oratoriens, prépara la chute de la maison de Bourbon. Savants dans l’antiquité, ceux-ci nourrissaient la génération nouvelle de la vertu des Aristide et des Gracques. Thibaudeau, avec la renommée et les opinions de son père, fut élu à la Convention nationale qui imprima au pouvoir une si sombre énergie. Il vint s’asseoir, à vingt-cinq ans, au sein de cette assemblée, dont le premier vote fut l’acclamation de la république. Rien de plus logique. Les colléges, les écoles chantaient depuis vingt ans les vertus des héros républicains de l’antiquité. De l’éducation, la république passa dans le gouvernement. On devait s’y attendre. Thibaudeau vota la mort de Louis XVI, sans hésitation et sans remords, comme un acte nécessaire au nouveau pouvoir, et il vint immédiatement siéger sur cette partie de la montagne, où s’asseyaient les ministériels de la révolution, car chaque système ases ministériels ; le comité de salut public eut les siens, dont les types furent Siéyès et Cambacérès, qui secondèrent constamment le comité. Les Mémoires de Thibaudeau disent qu’il n’aimait pas Robespierre, et cependant il vota constamment avec lui contre les cordeliers, les girondins ; il ne l’abandonna que le lendemain du 9 thermidor, parce qu’il n’était plus au pouvoir. Thibaudeau fit dès tors partie de cette majorité qu’on appela thermidorienne, et qui se composait de ces deux éléments : les débris des montagnards dantonistes, terroristes, ne brisant le pouvoir de Robespierre que par peur ou par vengeance, puis la partie la plus tempérée de la Convention qui se serait arrangée d’une formule de royauté avec le duc d’0rléans ou Louis XVIII (alors régent). Thibaudcau, d’une fermeté de caractère incontestable, avait parfaitement compris que, pour les votants de la mort de Louis XVI, il n’était pas de transaction possible avec la maison de Bourbon ; il fallait pour les conventionnels ou le maintien d’une république modérée, ou l’institution d’une dictature (empire ou consulat), née de la révolution elle-même, et garantissant tous ses principes et tous ses droits. En attendant, Thibaudeau appuya de ses votes les nouveaux comités formés après le 9 thermidor, s’opposant de toutes ses forces à la réaction royaliste. Il combattit également l’anarchie ou ce qu’on appelait alors la queue de Robespierre, et se fit surtout remar-