Page:Michaud - Biographie universelle ancienne et moderne - 1811 - Tome 3.djvu/61

Cette page n’a pas encore été corrigée

héréditaire de Prusse qui étaient venus le visiter : une armée, campée à Mühlberg, près de l’Elbe, offrit à ces souverains le spectacle d’une bataille fictive, où la vérité des tableaux n’était égalée que par leur magnificence. C’était le plus souvent aux dépens de la Saxe que le roi de Pologne étalait un luxe si somptueux. Cependant, il se faisait aimer de ses sujets, et soutenait avec dignité l’éclat de son rang dans les cours d’Europe, envoyait le comte de Hoym complimenter Louis XV sur son mariage avec la fille de Stanislas, cherchait à s’agrandir en Allemagne aux dépens de la succession de Charles VI, en refusant d’approuver la pragmatique sanction de cet empereur, projetait de céder aux puissances voisines quelques provinces de la Pologne, afin de les engager à le soutenir dans son dessein de rendre la royauté héréditaire dans sa maison, et unissait ainsi, par une bizarre alliance, des sentiments généreux à des habitudes despotiques, le goût des plaisirs aux soucis de l’ambition, et l’inquiétude d’une humeur guerrière à la mollesse d’une vie voluptueuse. La mort vint mettre un terme à ses fêtes et à ses projets. Comme il se rendait, en 1733, à une diète convoquée à Varsovie, la gangrène se mit à une plaie qu’il avait à la cuisse, et il mourut dans cette ville, le 1er  février de cette année. On cite de lui plusieurs mots pleins de bonté et de sagesse. Il accordait aux catholiques et aux protestants une égale tolérance. Sa femme, Christine Eberhardine, fille du margrave de Brandebourg-Culmbach, n’ayant jamais voulu renoncer au luthéranisme, il ne fit rien pour l’y contraindre ; mais ce refus empêcha cette princesse d’être couronnée reine de Pologne. Il donna ordre un jour, au primat et aux sénateurs, de faire cesser quelques vexations exercées par les catholiques contre les protestants : « J’ai été établi de Dieu, leur dit-il, pour protéger mes sujets sans exception, et pour les maintenir dans leurs priviléges, conformément aux lois du royaume. » — Il laissa de sa femme, un seul fils, Frédéric-Auguste (V. l’article suivant) ; mais il eut de ses maîtresses, un grand nombre d’enfants, entre autres, le célèbre Maurice, comte de Saxe, que lui donna la comtesse de Kœnigsmarck (Voy. son article). Le Dictionnaire historique de Bâle (Supplém., tome I, p. 968), a donné la liste des maîtresses et des enfants naturels d’Auguste II. G—t.

AUGUSTE III (Frédéric), électeur de Saxe et roi de Pologne, fils du précédent, naquit en 1676, et succéda, en 1733, à son père, dans l’électorat de Saxe. Vers la fin de la même année, Louis XV voulut placer sur le trône de Pologne Stanislas Leczinski, dont il avait épousé la fille ; mais la France était trop éloignée pour envoyer assez de troupes dans ce royaume. Une partie de la noblesse polonaise, retirée du champ d’élection, et soutenue d’une armée russe, élut Auguste III, qu’elle opposa à Stanislas, protégé par la cour de France ; cependant Auguste ne fut universellement reconnu roi de Pologne que dans la diète de pacification ouverte à Varsovie, en 1736. Quoique dépourvu des grandes qualités de son père, ce prince marcha en apparence sur les mêmes traces, se ruinant en magnificences, en musique et en tableaux, sans s’y connaître. Sa physionomie épaisse et muette n’avait aucun caractère, et son esprit était si borné que jamais il ne put apprendre la langue de son royaume ; son unique passion fut pour la chasse, et il abandonna tous les soins du gouvernement au