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redegimus, tertius jam ad secundum est reducendus et cum eo in unum confiandus. Képler cherche la cause de cette position parallèle de l’axe terrestre, dans une « inclination naturelle et magnétique de ses fibres au repos », et cette inclination (comme on le voit par un passage de l’Epitome, p. 176) lui apparaissait sous les espèces d’une forma, analogue à la propriété des fibres circulaires au mouvement de rotation, dont nous venons de parler plus haut. Cependant il ajoute aussitôt : vel etiam propter continuitatem diurnæ convolutionis circa hanc axem quæ illum tenet erectum, ut fit in turbine incitato et discursitante. Dans l’Epitome astronomiæ copernicæ, il emploie même, à propos du maintien de la direction de l’axe terrestre, le terme inertia ; c’est précisément le passage que nous avons cité plus haut et où celle-ci est définie comme la privativa causa motus.

En ce qui concerne les corps qui se trouvent sur terre, Képler, comme son illustre devancier, se sert de l’énoncé implicite que nous avons qualifié de « principe du mouvement relatif », afin d’ébranler le témoignage direct des sens : Motus enim non est proprium visus objectum, nec habet peculiarem sensum quo percipiatur, sed senso communi dejudiciatur (vol. VI, p. 181). Il fait valoir également le mouvement du navire et cite à ce propos le même vers de Virgile. Mais, tout comme Copernic, il sent sans doute que cela ne suffit point ; et n’ayant plus à sa disposition la ressource du « mouvement naturel », il imagine une théorie particulière. Si les objets terrestres sont entraînés dans le mouvement du globe, c’est à cause de l’action que la terre exerce sur eux. Cette action n’est pas simplement attractive, ou du moins ne l’est pas uniquement ; la terre entraîne aussi l’objet dans son mouvement circulaire et Képler semble croire que cet entraînement peut s’expliquer par l’attraction seule : Cum autem gravia petant Terrae corpus per se petanturque ab illo, fortius itaque movebuntur versus partes viciniores Terrae, quam versus remotiores. Quare transeuntibus illis partibus vicinis perpendiculariter subjectis, gravia inter decidendum versus superficiem transeuntem illam insuper etiam circulariter sequentur, perinde ac si essent alligata loco, cui imminent, per ipsam perpendicularem, adeoque per infinitas circum lineas, seu nervos quosdam obliquos minus illa fortes, qui omnes in sese paulatim contrahi soleant. Il est évidemment assez difficile de se représenter le mécanisme de cette action et de comprendre comment ces « nerfs obliques » pourraient exercer, sur un corps projeté en l’air, une poussée horizontale, pour le forcer à suivre le mouvement de la terre, alors qu’il aurait dû, en vertu de son inertia, rester au moins en retard sur le mouvement terrestre. Il paraît même, à première vue, étrange que Képler ait pu se contenter d’une conception de ce genre. Mais il ne faut pas oublier que celle-ci correspond à sa théorie de la révolution du système solaire : la terre fait tourner les corps voisins, tout comme le soleil, en vertu de sa