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un principe flexible qui s’accommode aux circonstances, admet des explications, engendre des illusions. La légalité au contraire est rigide, elle prétend gouverner tout ce qui n’est pas soumis au libre arbitre d’une volonté terrestre ou supraterrestre, elle ne comporte aucune exception. Comment cela a-t-il pu sortir de ceci, et sortir à l’aube même de l’intelligence humaine, puisque, nous l’avons vu, l’homme primitif (pour ne pas parler de l’animal) conçoit sans aucun doute nombre de phénomènes, tels que ceux de la gravitation, comme purement légaux ? Encore une fois, cette supposition paraît bien difficilement admissible ; cependant on n’ose affirmer qu’elle soit inacceptable. Notre individualité étant pour nous le type de toute unité, il y a en nous comme un secret penchant à croire à l’unité de notre intellect, penchant qui se trouve en quelque sorte gêné par la dualité du principe directeur que nous avons admis pour notre pensée scientifique. N’excluons donc pas absolument, sur ce point, l’idée d’unification. Insistons cependant sur ce fait que, du moins chez l’homme contemporain, en tant qu’il s’applique à la connaissance de la réalité, les deux principes doivent être considérés comme fonctionnant distinctement, bien que leur action s’enchevêtre sans cesse.