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jours de théorie de la connaissance, et la méthode également n’a point varié : nous cherchons encore, de préférence, à dégager les principes essentiels de la pensée par la considération des procédés que suit la raison scientifique. Nous tentons cependant de parvenir à nos conclusions (qui se trouvent un peu élargies) par une voie différente de celle suivie dans notre premier ouvrage. Nous avions, autrefois, traité le schéma d’identification comme un énoncé simplement heuristique, en nous appliquant à démontrer ensuite, par une analyse des théories scientifiques, que notre conception du rôle de ce principe offrait bien la clé expliquant aussi bien l’état actuel de la science que son évolution dans le temps. Il semble que cette manière d’exposer la thèse, en cherchant à atteindre, entièrement a posteriori, un résultat se rapportant à la logique des sciences, ait dérouté plus d’un lecteur, et des juges fort compétents, tout en appréciant avec bienveillance nos efforts, ont paru la désapprouver. C’est pourquoi nous nous sommes demandé s’il n’était pas possible de parvenir au même résultat par une marche plus proprement logique, en essayant de démonter plus directement le mécanisme de la pensée scientifique. Le processus d’identification venant se rattacher ainsi à la tendance générale à déduire la nature, à la concevoir comme rationnelle, comme nécessaire, peut-être trouvera-t-on son intervention dans le raisonnement scientifique mieux motivée.

Cette manière d’envisager le problème présente, en tout cas, l’avantage de le poser sous une forme plus générale que nous ne l’avions fait auparavant. C’est ainsi que nous avons pu, dans le présent travail, nous occuper de modes d’explication qui ne rentrent pas proprement dans le cadre de la science, du moins telle qu’elle est comprise de nos jours. Il est vrai que dans notre ouvrage antérieur déjà nous avions examiné les théories non-mécaniques, c’est-à-dire surtout les théories qualitatives ; mais c’étaient là encore des conceptions dont le caractère rigoureusement scientifique ne pouvait être méconnu. Par contre, nous avions complètement laissé de côté toute tentative d’explication logique (ou pseudo-logique) de la nature, telle qu’elle fait le fond de la théorie d’Aristote ou des tentatives des philosophes de la nature allemands ; ou du