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PRÉFACE

Nous pensons aider à la compréhension de notre travail en en résumant, d’avance, la marche générale. Nous cherchons à établir, dans notre livre Ier, que la conception courante de la science, qui est la conception positiviste, néglige deux constatations qui nous apparaissent comme fondamentales, à savoir d’une part ce fait indubitable que la science est essentiellement ontologique, qu’elle ne peut se passer d’une réalité posée en dehors du moi (chap. Ier) et, d’autre part, sa tendance, tout aussi manifeste, à dépasser la recherche de la loi par celle de l’explication (chap. II). Tout en faisant entrevoir que l’ontologie scientifique peut elle-même, en dernière instance, être considérée comme résultant du besoin d’explication, nous considérons cependant tout d’abord, dans notre IIe livre, les deux tendances sous leur aspect antagoniste, en montrant comment l’explication scientifique aboutit en réalité à la dissolution du monde extérieur dans l’espace indifférencié. En effet, ce que l’explication vise en premier lieu, c’est la déduction du phénomène en partant de ses antécédents, dont il devra constituer la conséquence logique (chap. III). C’est là un processus qui repose évidemment sur un postulat, qui n’est autre que la croyance à la rationalité de la nature (chap. IV), rationalité que l’on ne saurait réaliser que par l’application, à la déduction scientifique, du schéma ou processus d’identification (chap. V). Cette application est limitée par l’existence de l’irrationnel, aussi bien dans les sciences physiques (chap. VI) que — du moins autant qu’il est permis de formuler des hypothèses à ce sujet — dans les sciences biologiques (chap. VII). À l’intérieur du vaste champ qui reste dévolu à son action, l’explication scientifique est essentiellement spatiale, et nous en étudions les modalités (chap. VIII) et les possibilités futures