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introduction

peinture des mœurs, en général, il s’est maintenu, sauf peut-être vers la fin, dans la donnée ancienne. Les renouveleurs de chansons de geste modifient la forme, retranchent et surtout ajoutent des épisodes, mais ils conservent assez bien la couleur archaïque qui est comme de tradition dans l’épopée du moyen âge à ses diverses époques. Puis, nous savons bien que la féodalité n’a pas subi, du xie siècle au xiie, une transformation subite, de sorte que les notions que nous fournit Girart de Roussillon, pour n’être pas rigoureusement datées, n’en sont pas moins instructives.

Nous allons passer en revue les différentes classes de personnes qui figurent dans le poème, en commençant par le roi.


Le Roi. — Le plus souvent il est appelé Charles tout court, mais souvent il reçoit le surnom de Martel[1]. Est-ce Charles Martel ? Est-ce Charles le Chauve ? Le premier, semble-t-il, car l’auteur attribue à son Charles Martel un fils du nom de Pépin[2], ce qui convient au Charles Martel de l’histoire. Toutefois, vers la fin du poème, il y a un passage où Charles Martel a un ancêtre appelé du même nom, et reçoit lui-même le surnom de « le Chauve »[3]. Nous pouvons donc admettre que le renouveleur, du moins, entendait par Charles Martel l’empereur Charles le Chauve[4], mais le premier auteur avait plutôt en vue

  1. §§ 10, 17, 51, 56, 81, 89, 98, 112, 123, 128, etc.
  2. §§ 561, 601, 611, 616. Notons que ces passages sont dans la partie la plus remaniée du poème, comme aussi celui qui va être indiqué à la note suivante.
  3. § 636 : « Charles Martel, ton aïeul, fit de grands maux... Présentement, ton nom doit être Charles le Chauve. »
  4. Ce n’est point un fait isolé : la même confusion se retrouve dans