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iii. — l’ancienne et la nouvelle chanson

Girart ; nous venons d’étudier Girart de Roussillon dans la poésie, et nous sommes arrivés à distinguer en gros ce qui est propre au poème renouvelé de ce qui appartient à l’ancienne chanson. Par une fortune singulière, nous connaissons le même homme en son état historique et sous son aspect légendaire. Quel rapport y a-t-il entre le personnage historique et le héros épique ? ou, pour préciser la question, les récits qui concernent le second ont-ils leur fondement dans les faits historiquement établis de la vie du premier ? Girart de Roussillon est-il, en un mot, le comte Girart, grandi, transformé par l’imagination populaire ? — Non, assurément non. C’est vainement qu’on a essayé de trouver une base historique aux guerres acharnées de Girart et de Charles[1]. Il n’y a pas de trace de telles guerres dans nos annales. On n’y trouvera rien qui rappelle la bataille de Vaubeton, l’exil de Girart, la fuite de Charles jusque sous Paris. Ce que l’histoire authentique nous enseigne est bien différent. Elle nous montre qu’en 868 le comte Girart est, aux yeux de Charles le Chauve, « carissimus valdeque amantissimus »[2], qu’en 870, lors du siège de Vienne, il n’intervient dans la lutte que pour rendre la ville assiégée à l’empereur.

Le seul rapport entre le comte Girart et Girart de Roussillon, c’est que l’un et l’autre ont une femme appelée Berte, et que l’un et l’autre ont fondé Pothières et Vézelai. On est donc conduit à se représenter de la façon suivante l’origine du Girart épique. La mémoire du comte Girart et de Berte, son épouse.

  1. M. Longnon, l. l., pp. 268-9.
  2. Voy. ci-dessus, p. ix.