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iii. — l’ancienne et la nouvelle chanson

mis de Girart, le roi, qui se doute bien de ses intrigues, lui fait mauvaise mine. Elle ne se déconcerte pas. « Elle sourit, entre dans sa chambre, ôte sa robe et en met une plus belle, d’une fine pourpre toute parfumée. Elle avait la peau blanche, le teint clair. Elle était belle comme une rose en fleur » (§ 604). Ainsi parée, elle se présente de nouveau au roi-empereur dont elle obtient ce qu’elle veut.

Berte ne paraît pas avoir souffert plus que sa sœur cadette de l’outrage du temps. Pendant les trente-deux ans ou plus qui se sont écoulés depuis son mariage, elle est restée stérile ; mais, la paix rétablie, elle donne à son époux deux fils (§ 608)[1]. Ce n’est pas tout. Aux trente-deux ans dont nous avons fait le compte plus haut, ajoutons les sept années d’une trêve conclue à la suite des succès remportés par Girart sur ses ennemis (§ 607). Il y a trente-neuf ans au moins qu’elle est mariée, et c’est alors qu’elle est l’objet d’une tentative violente dont on peut lire les détails au § 648. « Elle avait une figure agréable, » dit le poète, « un teint délicat et une peau blanche comme fleur d’épine. » N’est-ce pas à croire que les deux sœurs avaient retrouvé la fontaine de Jouvence ?

Du reste, elles ne sont pas, dans cette partie du poème, les deux seules femmes privilégiées. Aupais, fille du duc Thierri et nièce du roi, s’est fait donner le comte Fouque, pris lors de la dernière défaite subie par Girart dans sa seconde guerre contre Charles. Elle avait, sans doute, l’intention de faire subir une dure prison à celui qui

  1. Chose singulière, cette circonstance avait été prévue par sa sœur, voy. § 588.