Page:Meyer - Girart de Roussillon, 1884.djvu/55

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
xxxvii
iii. l’ancienne et la nouvelle chanson

Dans le cas que nous venons d’examiner, il est évident que le poème renouvelé a mieux conservé l’ordre du poème original que la vie latine. Mais c’est un pur accident. En général, lorsqu’une différence existe entre les récits du poème renouvelé et ceux de la vie latine, on peut affirmer en toute sécurité que cette dernière représente le mieux la rédaction originale. Nous allons passer en revue quelques-unes de ces différences. Nous nous formerons ainsi une idée de plus en plus exacte du contenu de l’ancien poème, et en même temps nous apprécierons de mieux en mieux la part d’originalité qui revient au renouveleur.

L’une des plus notables, entre les différences que présentent les récits de la vie latine comparés à ceux du poème renouvelé s’observe dès le début. Selon la vie latine, comme selon la chanson renouvelée, Charles[1] et Girart ont épousé les deux sœurs ; celui-ci a pour femme l’aînée, appelée Berte, celui-là la cadette, qui s’appelle dans la vie latine Eloïse, nom qui se rapproche assez du nom d’Elissent adopté par le poème ; mais là se borne la parité des deux récits. Dans la vie latine, les deux sœurs ont pour père Hugues, comte de Sens[2] ; dans le poème, elles sont filles de l’empereur de Constantinople. On peut supposer que l’hagiographe a em-

    troublée : « ... invicem rex et Girardus, commissis indultis et veteribus querelis sedatis, firmo perpetue et sincere dilectionis glutino invicem confederantur, Girardo nimirum suo jure libere ac quiete potiente, et sic finis tam diuturne controversie fuit » (§ 72).

  1. Charles Martel selon le poème, Charles le Chauve — ce qui serait en, tout cas plus conforme à l’histoire — selon la vie latine ; je reviendrai plus loin sur cette différence qui n’est peut-être qu’apparente.
  2. Voy. ci-dessus, p. xxvii.