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girart de roussillon

579. — Oudin, » reprend Bertran, « montre-toi conciliant. Si Fouque prend Aupais, il s’engage envers vous à lui donner en oscle quinze cités, et en outre la Provence, Arles, Vienne et Valence. — Je ne consens, » reprit Oudin, « à aucune convention, que d’abord je ne vous aie pris et complètement défaits. Maudit soit le chevalier qui passe son temps en disputes ! » Là-dessus il pique des deux et saute dans l’Argenson. Bertran s’éloigne et la poursuite commence.

580. Oudin passa le premier avec ses fidèles, et tous les autres après, jusqu’au dernier, Bertran leur abandonnant le gué sans combat. Oudin a abattu un châtelain ; à leur première attaque, ils ont jeté à terre trente hommes. Oudin cria à Bertran : « Vous êtes sans force. En ce jour, vous serez lièvres et nous serons les chiens. On vous fera la chasse aujourd’hui et demain, si vous ne rendez Fouque et la coquine[1]. Où sont vos intrépides guerriers ? » À ce moment, Fouque parut, monté sur Cabauchan : « Vous allez les voir, » dit-il, « et tout de suite.

581. — Bertran, qui est celui-là ? (dit Fouque.) — Sire, c’est Oudin, le plus vaillant et le plus puissant de nos cousins. — Puisqu’il me tient de si près, » dit Fouque, « il ne faut plus qu’il se sépare de moi, ou je ne suis pas celui qu’Aupais nomme son ami. Maintenant, cousin Bertran, sonnez du cor ! » Et Bertran sonna avec une telle force, que le bruit fit retentir la montagne et le bois feuillu où étaient embusqués cinq cents jeunes gens. Ceux-ci se précipitent à l’envi, et grand fut le bruit des écus et des lances à la hampe de frêne, aux gonfanons rouges, blancs ou pourpres. Ils occupent la plaine et les chemins. Maintenant le chien deviendra lièvre, et le lièvre chien. De leur côté les gens de pied sortent du bois de saules[2], conduits par

  1. Aupais.
  2. On a vu que la lutte a lieu sur les bords d’une petite rivière.