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girart de roussillon

l’abat mort devant Pierre. Pierre le frappe à son tour et lui fait entrer dans le corps sa lance au fer froid. Cette fois le comte Girart a fait une folie.

492. Voici chevauchant Eble de Bordeaux, c’était le sénéchal de Girart : il appelle Pierre de Mont-Rabei par son nom. Celui-ci ne se dérobe pas, mais se détache de la compagnie qu’il guide. Eble le frappa en la poitrine, lui tranchant et déchirant le haubert, et lui fit un trou dans le flanc, sous l’aisselle. Pierre tira son épée à la lame verte[1] et lui donna un tel coup sur le heaume qu’il le fit chanceler et lui en enleva un morceau le long de la joue, lui coupant les cheveux au ras de la tête. Vous auriez vu là tant de damoiseaux désarçonnés ! Il y en avait un millier d’abattus en un vallon, belle jeunesse dont la perte répandit au loin le deuil. Dieu ! que cette bataille fit pleurer de damoiselles et de jeunes dames veuves !

493. Merianz[2] un breton roman[3], accourut au galop. Il n’avait pas l’air d’un jeune varlet, et cependant personne ne voulait rompre une lance avec lui. Il était étroitement chaussé....[4]. Il va férir Fouque de Mont-Folet et le renverse mort tout près d’un petit ruisseau. Vers ce moment, le roi chassait Girart du champ de bataille.

494. Ce fut au mois de mai que cette bataille eut lieu entre Charles et le comte Girart dans la plaine, sous Roussillon, par les guérets. Dieu ! que de bons vassaux y sont couchés morts ou blessés ! Du côté de Girart sont les douleurs et les peines cuisantes. Et quand le comte vit que tout

  1. Sic dans les deux mss.
  2. Quonis dans P. (v. 6278). Merian est bien un nom breton : voy. Cartul. de Redon, pièce 371 ; la chanson d’Aquin, vv. 60, 750 ; le Brut de Geoffroi de Monmouth, III, xix, celui de Wace, v. 3739, etc.
  3. Uns romanz bret ne peut guère se traduire autrement ; la leçon de P. (v. 6278), .j. molt pro bet (corr. b[r]et) semble refaite.
  4. Il y a ici quatre vers, qui manquent dans P. et dont le sens m’est trop obscur pour que je tente de les traduire.