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girart de roussillon

pouillé de nos génitoires. Vous vous arrangerez comme vous pourrez avec lui, mais, pour sûr, vous ne m’aurez jamais plus pour messager !

467. — Mais d’abord dites-moi, sire moine, comment vous avez quitté Charles. — À Roussillon, j’ai été, sire, fort mal reçu. Je lui dis que son avoir serait bientôt rassemblé et que tu le lui enverrais par tes hommes[1]. Lui, cependant, se montra furieux contre moi : il dit que vous vîntes tout jeune à son père et fûtes nourri par lui mieux qu’on ne le fût jamais ; que lui-même, le fils, vous adouba. Lorsque vous fûtes parvenu à la plénitude de vos forces, et qu’il s’attendait à être servi par vous, vous avez été le premier à lui faire du mal. Il ne fera point accord avec vous jusqu’à ce qu’il vous ait ruiné de fond en comble et réduit à vous exiler outre-mer[2].

468. — Seigneurs, » dit Girart, « il m’est douloureux de me voir enlever si vite ma terre. Le roi ne dira pas que je l’aie trahi, puisque je propose de m’engager à réparer le dommage que je lui ai causé depuis que je suis chevalier. Mais il aura moissonné et rentré le blé qu’il sème en son champ, et avril et mai seront passés avant que j’aie conclu avec lui trêve ou accord !

469. « Moine, sais-tu d’autres nouvelles du roi Charles ? — De mauvaises, oui, » dit le moine. « Je l’ai entendu jurer par Jésus du ciel que, s’il peut vous prendre, vous ou don Boson, il vous ferait pendre comme larrons [par le pire garçon de sa maison[3]], » Girart sourit sous sa moustache : « Puisqu’une démarche comme celle que nous avons faite auprès de lui ne le satisfait pas, mes barons et mes hommes ont leurs chevaux et le butin ; avec tout cela nous nous rendrons à Dijon. »

  1. C’est, en effet, ce que Fouque a conseillé de faire ; voy, § 457.
  2. Cf. p. 67, n. 3.
  3. Dans P. seul (v. 5979).