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girart de roussillon

qui était fatigué et affaibli dormit de bon cœur. Il y en eut mille qui gisaient par les prés, non pas sur une hauteur.

412. Fouque se jette sur eux à la pointe du jour. Il en trouve mille, étendus, désarmés par les prés, qui, surpris à l’improviste, n’ont pas le temps de s’armer. Boson et Gilbert les tuent tous. Le roi n’avait que quatre cents hommes armés. À leur tête, il charge avec fureur, quand il reconnaît Fouque avec sa nombreuse troupe et voit briller sous les enseignes tant de heaumes. Il se sentit pris d’épouvante. Il n’y a aucun des siens qui ne tienne son cheval pour lent ; le roi lui-même voudrait le sien plus rapide. Il n’arrêta pas jusqu’à tant qu’il fût dans le château[1]. Une fois là, les murs le protègent. Cependant, Girart est dehors qui ramasse le butin.

413. Le comte Girart s’en retourne avec ses neveux. Comme il revenait de la poursuite, il rencontra cent [des royaux] qui se tenaient à une croix, et qui, tous d’une voix, criaient merci. Le comte et son neveu Boson les tuèrent tous. Il n’était pas possible que Dieu n’entrât pas en courroux contre lui ; et dès lors la guerre tourna au désavantage de Girart[2].

414. Il y avait un moutier dans la plaine, sous Vaucouleurs, avec un abbé, des prieurs et des moines. Mille chevaliers s’y réfugièrent. Girart les y brûla sous les yeux de Charles l’empereur, faisant grand tort envers Dieu et envers son seigneur. Fouque ne put s’empêcher d’en pleurer : « Que deviendrons-nous, » dit-il, « pécheurs que nous sommes ? Qui ne porte foi au Rédempteur ne peut vivre longtemps sans déshonneur. »

415. Girart a pris du butin tant qu’il a voulu. Il se rend à Roussillon, son séjour habituel. Il est plein de joie tandis

  1. Vaucouleurs ; cela résulte du § 414.
  2. Cet épisode a été mentionné, sans indication de source et comme historique, par M. Ch. de Beaurepaire, dans son Essai sur l’asile religieux, dans la Bibl. de l’Éc. des Ch., 3, V, 164-5.