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girart de roussillon

220. Le premier qui prit la parole fut un comte, don Emoïs : « Sire roi, pourquoi mentirais-je ? Boson d’Escarpion a tué Thierri ; mais, si Girart n’en a rien su, n’a pas été de connivence, s’il peut, comme un homme sage, s’en escondire, il ne doit pas perdre une aune de sa terre. — Par mon chef, » dit Charles, « puissé-je l’entendre parler ainsi ! Je ne lui demande rien de plus que de se défendre, mais il ne le pourrait faire, pour tout Paris ! — Alors, » reprend l’autre, « je n’ai plus rien à ajouter, et je m’en tiens à ce que j’ai dit.

221. — Conseillez-moi, barons, pour l’amour de Dieu. Il s’agit de Girart qui m’a trompé, de Girart qui naguère avait pour moi tant d’affection. Comme je ne me défiais pas de lui, il m’a fait cette honte, ce déshonneur, de tuer Thierri d’Ascane, le meilleur de mes fidèles, à qui moi et mes frères avions donné notre[1] sœur. C’est pour cela que je vous demande conseil, seigneurs. Puisqu’il est un traître prouvé, je ne lui laisserai pas un château, pas une tour ; il ne lui restera pas, si je puis, une maison de sa terre !

222. « Je vous en prie tous qui êtes ici présents, pour Dieu ! qui sait conseil me le donne, au sujet de Girart, ce comte de Roussillon, qui, le jour où il avait mangé en ma maison, prémédita la mort de mon baron, la trahison à laquelle succomba le duc Thierri, tué en ma cour par les mains de Boson. Il n’y a en ma cour chevalier, brave ou lâche, bon ou mauvais, que je ne prouve mauvais et félon s’il me donne un démenti ! »

223. Le premier à prendre la parole fut Arman de Beaumoncel [2] : il parla en jeune homme irréfléchi : « Sire, je ne

  1. P. (2932) : « à qui j’avais donné ma sœur. » Le vers manque dans L.
  2. Beaumoncel est un nom de lieu qui existe dans le Calvados, Eure et la Sarthe.