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ii. — la poésie — girart de frete

à Charlemagne. On pouvait conjecturer avec vraisemblance que ce récit n’avait point été inventé par Andrea da Barberino qui vivait à la fin du xive siècle et au commencement du xve : le vraisemblable est devenu certain, maintenant que nous savons qu’il est fait allusion à ce même récit dans l’Entrée de Spagne qui est de la fin du xiiie siècle[1]. On peut donc croire qu’il a existé une chanson de geste de Girart de Frete qui ne nous est pas parvenue.

Il y a longtemps déjà qu’on s’est accoutumé à considérer les histoires fabuleuses de Girart de Vienne et de Girart de Frete comme deux variantes du même récit[2]. Elles ont, en effet, deux traits communs : 1° l’idée d’une lutte entre un vassal orgueilleux appelé Girart et Charlemagne ; 2° le rôle important que joue la ville de Vienne dans l’un et l’autre roman. Mais c’est tout, et c’est bien peu. L’idée, du reste séduisante, sur laquelle repose l’assimilation des deux histoires, est qu’il s’est conservé dans la mémoire du peuple quelques parcelles de l’histoire réelle du comte Girart, et que ces parcelles ont servi de base à des compositions poétiques indépendantes les unes des autres. Mais qu’y a-t-il de commun entre les romans qu’on a faits au xiie siècle sur Girart de Vienne et Girart de Frete, et ce que nous savons de la vie du comte Girart ? Le nom de Girart et celui de la ville de Vienne, qui se rencontrent de part et d’autre, ne suffisent assurément pas à établir la continuité de traditions ayant pour point de départ le comte Girart.

  1. Ant. Thomas, Nouvelles recherches sur l’Entrée de Spagne, chanson de geste franco-italienne, Paris, 1882 (Biblioth. des Écoles françaises d’Athènes et de Rome), p. 41.
  2. P. Paris, Hist. litt., XXII, 305 ; G. Paris, Hist. poét. de Charlem., 325 ; Longnon, l. l., 276.