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appendice

envoieray premiers, et ma suer et moy nous sieuvrons avecques Bertran et plusieurs autres qui me tendront compaignie. Et au triboul comme (fol. vc xxviij) au triboul, le roy se rapaisera après s’il voeult. »

Quant la royne eut en son cœur entreprins la salvation du duc Gerard, elle manda ung moult noble homme nommé Droon[1], lequel avoit un filz, chevalier preu, sage et vaillant, nommé Anchier quy le chastel de Roncillon avoit en garde de par la royne, et luy dist : « Vous me ferez finance de gens, sire Droon », fet elle, « et me conduirez le mien frere Gerard que cy est, sur vostre vie, jusques a Roncillon, et direz de par moy a vostre filz Anchier qu’il le rechoive leans et qu’il luy livre le chastel et tous ceulx de la contrée, et que je iray brief par dela après vous. » Pour abregier, Droon obey de bon cœur a son commandement, et par l’ordonnance de la royne luy fist un cheval delivrer tel que ou païs n’en avoit point de meilleur. Si s’en partirent et chevauchierent tant qu’il arriverent près de Roncillon. Et quant ilz furent auques près, ou prochain bois, Droon dist au noble duc que bon seroit qu’il demourast illec jusques à ce qu’il feust retourné de Roncillon[2]. « Et que voulez vous aler faire a Roncillon, sire Droon ? » ce luy dist lors le duc. — « Je m’en yray parler a mon filz Anchier, sire duc », fet il, « et sçauray se les manans et habitans de leans seront joieulx de vostre venue ou non. » Et fin de compte s’en party et laissa le duc en la forest quy estoit ung petit pensif pourquoy Droon tenoit ces termes, mais l’istoire dit que pour ce le faisoit qu’il sçavoit de vray que tant l’aymoient ceulx du paijs que a l’en devant de luy vendroient honnourablement, mais que ilz sceussent de vray sa venue. Et quant Droon fut leans arrivé, Anchier le receupt moult joyeusement et luy demanda des nouvelles de la court[3], et il luy racompta la venue du noble duc Gerard, le traittié du (vo) roy et de luy, et comment la royne l’envoioit en Roncillon pour luy faire ses terres delivrer.

  1. Cf. la chanson § 554, où toutefois il n’est pas parlé d’Anchier.
  2. Cf. § 555.
  3. Cf. le § 556 où cette question est attribuée aux habitants de Roussillon en général.