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ii. — histoire de charles martel

pour y rien gloser, retrenchier ou adjouster, sinon de moy y conduire tellement que ma conscience n’en soit charge, et tout ainsi que ou dit volume rymé l’ay trouvé, sur lequel j’ay ceste besongne encommencée, priant a tous ceulx quy la lirront ou orront lire vœullent suppleer a mon trés petit entendement et corrigier les faultes, s’aucunes en y a.


77. — Comment Charles Martel et Gerard de Roncillon occirent et bouterent les Sarrasins hors de France qu’ilz vouloient occuper[1].


L’istoire ancienne racompte que, comme nouvelles sont tost espandues par les contrées, les Sarrazins furent advertis de la grande et mortelle guerre quy estoit en France et que tant de peuple chrestien avoit occis l’un l’autre ; se bouterent les Sarrazins d’Espaigne et des contrées prochaines joingnans et voisines au royaulme de France, et, a si grosse (f. iijc iiijxx xvij) puissance et armée comme ilz peurent plus, se misrent en vaisseaulx et en groz nafvires ; si nagerent tant qu’ilz arriverent en la riviere de Geronde, et conquirent la plus part de la terre du conte Huidres quy fut occis en la bataille de Vaulbeton, comme dessus est declairé, et furent jusques en Terrascon, en Barselonne et en la terre de Prouvence et de Languedoch, et pareillement en la terre de Nerbonne, dont les princes et seigneurs furent comme esbahis. Or estoient ce temps pendant les nobles princes chrestiens en France, ou ilz sejournoient avecques leurs amis, et se raffreschissoient en pensant de remettre sur leurs besongnes en memoire et souvenance des guerres qu’ilz avoient eues, a quoy ilz ne vouloient plus penser, car bien leur sembloit que de tous poins ilz en estoient dehors. Mais tant leur revint a besongnier que bien leur pouoit du temps passé souvenir. Car tous a une foiz leur envoierent ceulx du paijs quatre messages, dont les deux alerent par devers le roy Charles Martel et les deux autres devers le noble duc Gerard, l’un et l’autre par devers le conte Fourques.

  1. Cf. la chanson, §§ 190-9.