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INTRODUCTION

éclatant des doctrines de Lavoisier, un de ses disciples les plus en vue, Fourcroy, ne cessa pas de s’étonner du peu de répercussion qu’eurent en leur temps les travaux injustement dédaignés des précurseurs de génie. Que penser, demanda-t-il dans l’Encyclopédie méthodique, « que penser de Stahl qui, contemporain de Hales et publiant même quelques ouvrages après la statique des végétaux, n’a fait aucune attention à ses expériences, semble avoir entièrement ignoré ses découvertes et, en général, n’a tenu aucun compte de l’air et de ses effets dans les phénomènes de la Nature et de l’Art ? » Il écrivait encore en 1731 : « L’expansion ou la forme élastique est tellement propre à l’air, lui est tellement essentielle qu’il est impossible de concevoir qu’il puisse, dans aucun cas, ni par lui-même ni par d’autres mélanges, se condenser et prendre une véritable solidité ». (Ouvrage intitulé : Experimenta observationes et animadversiones, § 47.) On ne peut certainement pas s’exprimer d’une manière plus positive et plus claire ; Stahl ne croyait pas du tout « à la fixation de l’air, à la perte de son élasticité par la combinaison, à son union avec des liquides, à son dégagement ou à son passage de l’état non élastique à l’état élastique[1] ». Fourcroy, il est vrai, ne parvient pas à se rendre compte des raisons profondes de ce que nous oserions appeler le préjugé négatif de Van Helmont, de ses disciples et, en dernier lieu, de Stahl ; il en cherche de petits motifs et insinue que peut-être le grand chimiste allemand, jaloux de l’œuvre de Hales, aurait tenté d’étouffer les trouvailles d’un rival notoire ! Sans doute, à cet égard, Fourcroy faisait-il une grave erreur ; il n’en est pas moins vrai que, pour bien saisir la signification de la théorie du phlogistique, il faut avoir présent à l’esprit qu’elle a pris naissance dans une École qui refusait à l’air toute place en tant que réactif chimique.

Nous n’allons pas insister ici sur les problèmes que nous venons de mentionner et sur d’autres cas semblables que nous pourrions aussi citer. Considérons comme acquis qu’il

  1. Encyclopédie méthodique, 1796-1805, vol. III, art. Chimie, p. 333.