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LES THÉORIES CHIMIQUES AU XVIIe SIÈCLE

trait dans le plan comme dans l’exposé de ses travaux avec l’aspiration des « honnêtes hommes » raisonneurs qui formaient alors le public cultivé, et qui lurent avec intérêt une œuvre immédiatement compréhensible au profane. L’historien pourrait s’y tromper ; si nous abordions la chimie de Lémery sans rien connaître des essais de ses prédécesseurs, nous penserions que cette œuvre d’apparence classique est née toute formée dans le cerveau d’un seul homme ; nous n’y trouverions par exemple aucune allusion à la métaphysique savante et délicate que Lefèvre avait pu construire en modifiant, par ses réflexions personnelles, les systèmes de Paracelse et de Van Helmont, dérivant eux-mêmes du néoplatonisme arabe : aucune allusion non plus aux travaux des anciens ou des alchimistes du moyen âge, dont les doctrines jusqu’alors étaient sinon admises par tous, du moins discutées sérieusement ; à l’exception de Robert Boyle, son contemporain Lémery semble ignorer que la chimie était cultivée par un grand nombre de chercheurs ; il nous livre une science complète qui se suffit à elle-même et qui n’a besoin d’aucun appui !

En dehors donc des quelques termes techniques, dont le savant est bien obligé de faire usage, termes qui s’apprennent fort rapidement, le cours de chimie par Lémery sera accessible, sans éducation préalable, à tout homme intelligent qui aura l’habitude de suivre les travaux de laboratoire ; les expériences y sont non seulement décrites d’une manière