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les doctrines chimiques en france

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Et, tout de suite, nous prévoyons qu’une fois les généralités de cette philosophie posées, une fois que ses principes auront triomphé, un grand nombre de savants vont se perdre dans un luxe de détails plus hypothétiques les uns que les autres, et qui donneront à leur système une apparence romanesque. Le mécanisme, qui tout d’abord avec Robert Boyle et Lémery, se confondait avec l’empirisme expérimental, s’en éloigne de plus en plus à mesure qu’il se précise. Comme les doctrines qu’il a renversées, il ne suffira plus aux savants, qui lui reprocheront d’ajouter l’hypothétique conjecture au fait assuré et observable. Et comme ces anciennes doctrines, il s’est effondré sous le poids de ses propres excroissances et de ses perfectionnements.


C. — C’est que la chimie mécaniste, éblouie par l’éclat extraordinaire de ses succès, avait, avec une naïve confiance, voulu pénétrer complètement, du premier coup d’œil, les causes de toutes les réactions, et, avec une juvénile audace, s’était hâtée de rendre compte des phénomènes les plus curieux observés au laboratoire… La « pernicieuse manie de tout expliquer[1] » ne permettait de douter en aucun cas, à propos d’une expérience quelconque, de son interprétation métaphysique ; pas un savant n’aurait, devant une difficulté imprévue, avoué son hésitation, en

  1. Sprengel.