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essai sur la chimie expérimentale

« quantité de matière » n’était pas encore dégagée avec toute la précision désirable ; si Van Helmont et Borrichius la mesurent à l’aide de la balance, les cartésiens la confondraient plutôt avec l’étendue qu’elle occupe, c’est-à-dire avec son volume ; et, comme chacun sait, les deux manières de voir ne coïncident pas malgré le désir des chimistes ; le rapport entre les deux grandeurs, masse et volume, n’est pas constant et s’appelle la densité[1] ; mais, avant le triomphe de la philosophie newtonienne, le mot « pesanteur » ne signifiait pas tout à fait ce qu’il signifie aujourd’hui ; si la confusion entre le « poids » et la « masse » n’a jamais troublé la chimie, l’équivoque créée par l’emploi du mot pesanteur pour signifier soit la « densité » soit la « masse » aboutissait dans la pratique à des difficultés inextricables, et pour les lever chaque auteur faisait intervenir son opinion personnelle sur le système général du monde[2].

N’allons pas suivre Jean Rey dans ses efforts pour rejoindre la chimie à la cosmologie ; nous noterons seulement que cette cosmologie était singulièrement archaïque et avait peu de chance d’être prise en considération. Jean Rey n’a-t-il pas écrit au père Mersenne, en réponse à quelques objections, que

  1. C’est ce que M. Meyerson appellerait un « irrationnel ». Varignon demandait pourquoi tous les corps n’avaient pas la même densité.
  2. Nous y reviendrons au chapitre consacré à la philosophie newtonienne dans le volume ii de cet ouvrage.