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essai sur la chimie expérimentale

Louis Lémery hésite à prononcer un jugement aussi sévère, et, en pensant à l’énergie déployée par ses prédécesseurs pour courir après une chimère, aux espoirs que leur travail a définitivement condamnés après les avoir suscités, il écrit ces lignes pleines de sagesse :

« Je réponds qu’on n’a été porté de penser juste sur le compte des analyses que depuis qu’elles ont été faites, et qu’on a pu en considérer avec soin toutes les circonstances, et les comparer les unes avec les autres. La connaissance de leur peu d’utilité étant donc le fruit de l’expérience, il fallait, pour en être convaincu, et pour être en état de découvrir en quoi consistait leur défaut, il fallait, dis-je, que ces expériences eussent été faites ; et quand bien même on aurait pu prévoir, avant ce temps-là, tout ce que l’expérience a fait reconnaître depuis, les raisons qui auraient été alléguées pour détourner du travail des analyses, n’auraient tout au plus été regardées que comme de simples conjectures, incapables de captiver et de fixer la confiance et qui n’auraient pas même tenu contre l’idée des avantages que le’ public prétendait tirer du travail dont il s’agit. Enfin, comme ces conjectures n’auraient pu être vérifiées que par le travail même des analyses, il aurait toujours fallu les faire, avec cette seule différence qu’elles seraient venues après les conjectures, et qu’elles en auraient été, en quelque sorte, la confirmation, au lieu que dans le cas présent elles ont précédé et fait naître ces réflexions.