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LES DOCTRINES CHIMIQUES EN FRANCE

effectua tout d’abord une œuvre négative et salutaire d’assainissement, dont on ne peut nier l’utilité et la bienfaisance.


B. — Le terrain une fois déblayé, la philosophie mécanique tenta, elle aussi, de construire ; son principe fondamental de ramener la matière à l’espace lui avait tracé le plan d’un monument harmonieux ; elle s’efforça d’y loger la variété infinie des corps et l’ensemble d’apparence hétérogène de toutes les réactions chimiques.

Sans discussion aucune, Lémery admit la structure discontinue et corpusculaire de la matière ; il supposa que les substances variées que la chimie étudie, les métaux, par exemple, les acides, les alcalis, les sels, les huiles ou les soufres, sont composés de petits corps ayant une forme caractéristique. Ces petits corps ne restent pas inactifs ; semblables aux instruments de l’ouvrier, aux couteaux, aux ciseaux, aux scies, aux coins, aux leviers, ils réagissent les uns sur les autres, s’insinuent les uns dans les autres ou séparent par leur action ceux qui étaient précédemment unis. Lémery, sans le déclarer expressément, donne à ses atomes une certaine consistance, et leur figure ne s’altère pas facilement. Leur suppose-t-il, comme les atomistes, une rigidité très grande et une stabilité absolue, ou suppose-t-il, avec les carté siens, une divisibilité allant à l’infini ? Sans s’embarrasser de ces discussions métaphysiques, sans juger utile de s’exprimer explicitement, le grand chimiste