Page:Metzger - Les doctrines chimiques en France du début du XVII à la fin du XVIII siècle, 1923.djvu/290

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
288
LES DOCTRINES CHIMIQUES EN FRANCE

la pauvreté de leur pensée. Lémery ne déclare d’ailleurs à aucun moment que la transmutation des métaux soit chose théoriquement, impossible ; au contraire, puisqu’il croit être en mesure de donner l’histoire de la formation de ces mixtes au sein de la terre. Si donc la tentative des alchimistes lui semble absolument chimérique, c’est tout d’abord, sans doute, qu’elle n’a abouti qu’à de multiples échecs, mais c’est surtout parce que la tendance au perfectionnement de la Nature, désireuse de réaliser un état d’équilibre stable, est incompatible avec la philosophie mécanique dont les principes lui paraissent évidents… Et la condamnation indirecte dont le mécanisme a frappé l’alchimie en méconnaissant sans le combattre le ressort profond qui soutenait cette doctrine, a été si efficace qu’elle ne s’est jamais relevée du discrédit où ses détracteurs l’avaient jetée.

Lémery ne comprend pas non plus les analogies et les sympathies qui, sous l’influence de Paracelse, avaient tout d’abord dominé la médecine, puis envahi le domaine entier des sciences naturelles[1] ; les correspondances entre les métaux, les planètes et les parties du corps humain, les similitudes, que les chimistes avaient cru pouvoir établir entre les faits les plus disparates et les corps les plus variés, les généralisations audacieuses de ceux qui, se basant sur ces brillantes hypothèses, voulaient déduire le système

  1. Voir chap. 3, par. 2.