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LES DOCTRINES CHIMIQUES EN FRANCE

philosophie de la matière qui jusqu’alors formait le fond des méditations des savants. Certes, la chimie est une science si vaste, ses données expérimentales sont si complexes et si difficiles à recueillir, leur interprétation théorique si délicate et malaisée, qu’aucun chercheur n’est parvenu sans avoir recours à l’aide d’autrui à en explorer le domaine ! Et, quand, on a pénétré la pensée des prédécesseurs immédiats de Lémery, il est facile d’observer à quel point celui-ci a su faire usage de l’enseignement que lui avait donné ses maîtres !

Mais quel que soit le profit que Lémery a tiré du labeur déjà fourni par ses collègues, son ouvrage au premier abord semble absolument indépendant du milieu scientifique qui lui a donné naissance ; les traits mêmes, par lesquels on a caractérisé les œuvres classiques du grand siècle et qui sont tout à fait saillants chez les penseurs cartésiens, se retrouvent dans le « cours de chimie ». Tout d’abord, les termes techniques, qui sont des plus rares, sont définis aussi clairement que possible, afin que les lecteurs ignorants puissent parvenir sans difficulté à l’intelligence de cette science. Puis Lémery ne se vante aucunement d’avoir découvert quelque fait extraordinaire ou imprévu ; il ne se pique d’aucune recherche sensationnelle et met toute son ambition, semble-t-il, à bien décrire ce que chacun observerait dans les mêmes conditions de travail. « Je n’affecte point, dit-il expressément, d’être particulier en mes opérations » ; et jamais il ne se perd dans l’exposé