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LES THÉORIES CHIMIQUES AU XVIIe SIÈCLE

« Quand les chimistes, — dit Boerhave, qui s’élève avec force contre les séductions de cette orgueilleuse illusion[1], — quand les chimistes eurent découvert l’action qui était propre à un corps particulier, ils regardèrent cette propriété comme universelle et avancèrent hardiment qu’elle était la même dans tous les corps, enfermant ainsi toutes les actions de la nature dans les limites étroites de cette manière d’agir. » — Ils imitèrent en cela les philosophes qui, voyant l’aimant attirer le fer, imaginèrent partout des attractions.

Les considérations précédentes nous font comprendre les causes de la constatation suivante ; vers le milieu, du xviie siècle, la science chimique ne comportait aucune doctrine établie à laquelle le savant, sans discussion aucune, accordait son adhésion ; le chimiste (ne se proposait pas alors de rectifier sur quelque point ou de modifier légèrement un corps de doctrine admis par tous ; bien souvent il affectait d’ignorer les travaux de ses prédécesseurs ; même s’il se montrait respectueux de quelque tradition ancienne, il lui fallait reprendre pour son propre compte la justification de cette théorie ; l’antiquité d’une opinion n’était plus une autorité qui fortifiât son consentement et l’esprit de chacun était juge en dernier ressort de l’œuvre de l’humanité !

À cette époque, l’individu, par le seul effort de sa raison, croyait parvenir immédiatement à la connais-

  1. Chimie, 1re leçon, voir l’édition de 1754.