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de la confiance que l’homme doit avoir en des desseins qu’il n’aperçoit pas. Une citation d’un sermon sur la vêture, de Segand, et une autre de la neuvième Méditation de saint Bernard sont supprimées : la substance en est assimilée au texte. La citation de l’Ecclésiaste, traduite en 1834, est ainsi mieux fondue dans la teneur du texte. Un passage sur ceci que « ce qui est vrai essentiellement n’est pas d’une évidence palpable », est complètement remanié. Une citation, incluse au texte en 1819, extraite d’un sermon sur « l’imperfection de nos connaissances relatives à un état futur » est rejetée en note en 1834t comme rompant la continuité du chapitre.

Où l’édition de 1819 donne : « Il vaut mieux d’abord exiger moins de soi-même et ne se rebuter jamais. Vous ferez le plus possible, ou du moins vous vous attacherez à ne rien omettre ; et toutefois vous ne tomberez pas dans le découragement lorsque vous n’aurez pas fait tout ce que vous désiriez ou même tout ce que vous deviez faire. »

Celle de 1834 donne : « C’est une imprudence d’exiger beaucoup de soi-même quand on n’a pas encore éprouvé ses forces ; il vaut mieux les ménager d’abord et ne les perdre jamais. Le temps viendra d’entreprendre le plus possible, ou du moins, de s’attacher à ne rien omettre. A aucune époque cependant vous ne devez désespérer de vous-même, lorsque vous n’avez pas fait, dans une circonstance paiticulière, ce que vous aviez attendu de vous, ce que la raison pouvait demander, sans l’exiger absolument. » (Sénancour est de plus en plus un directeur de conscience rationaliste, expert en la psychologie du progrès ou du relèvement moral ; les citations extraites des textes religieux et même des sermonnaires contemporains montrent d’ailleurs tout ce qu’il doit à la culture chrétienne).

Tout le développement sur ce qu’il est permis d’attendre de « la bonté infaillible » est transformé. Les phrases sont interverties ; Sénancour recherche un mouvement plus persuasif, plus consolant ; s’il ne cesse pas de travailler l’expression, c’est qu’il croit que l’harmonie des mots, l’allure du style, concourent à la puissance de conviction qui émane d’une pensée. Il acquiert l’onction chrétienne ; il imite plutôt encore la grandeur du style biblique.