Page:Merezhkovsky - Tolstoï et Dostoïevski, la personne et l’œuvre.djvu/18

Cette page a été validée par deux contributeurs.

tissions vivre d’une vie puissante et intense. Il fallait qu’ils ne nous apparussent pas seulement comme des produits de l’évolution, de cette évolution qui nous entraîne nous-mêmes dans son courant irrésistible. Nous devions encore sentir un lien entre leur pensée et notre pensée, entre leur façon de sentir et la nôtre, entre notre être et leur être. Nous devions, en quelque sorte, les sentir en nous, liés à nous par l’intime communion qui unit le père à l’enfant.

Ce résultat, je le répète, nous ne l’avons pas encore pleinement atteint. Mais nous nous acheminons irrésistiblement vers lui, car il était en germe dans le principe même de la nouvelle école. Car, en reliant l’étude de l’art et de la littérature à celle des destinées de l’homme sur la terre, cette école a fait de la critique un élément actif du progrès humain. Reconnaître ce qu’il y a d’humain dans le génie, voir clairement reflété en lui ce que nous avons de plus essentiel, est, pour nous, qui avons appris à le faire, un stimulant sans pareil.

Déjà Voltaire, qui n’a fait qu’effleurer tout, mais qui a tout effleuré avec l’aile du génie, du clair génie français et qui, par conséquent, a généralement touché juste, déjà Voltaire, tout en indiquant, dans son petit essai sur la tragédie anglaise, comment le génie littéraire naît du génie national, a montré, dans son discours de réception à l’Académie fran-