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LES COMÉDIENS TRAGIQUES

VII

Le surlendemain, Alvan descendait dans la plaine pour la rejoindre et comme lors de leur précédente rencontre, elle eut l’impression de ne l’avoir pas quitté. C’est l’impétuosité d’Alvan qui créait cette illusion. Il était le rayon matinal des soleils d’été ; son ardeur, stimulant du premier coup le sang de Clotilde, en chassait toute la réserve hésitante qu’amène souvent l’éloignement, et que fortifient la terreur des démarches à entreprendre et la pudeur des démarches accomplies, comblait en un mot les brèches et dissipait les inquiétudes que creusent au contraire et accusent les hommes froids. Clotilde, qui s’était habituée au feu de ses messages, eût préféré qu’il continuât à la faire tressaillir et frémir de loin, mais elle ne lui réserva pas moins un chaleureux accueil et, réconfortée par son étincelante présence, oublia bientôt toute timidité. Elle se crut, par cette vaillance nouvelle, haussée à son niveau, et pensa le prouver, en discutant avec lui les moyens pratiques d’assurer leur union. Pour commencer, elle avait droit à des éclaircissements sur un sujet que ses parents ne pouvaient manquer d’invoquer contre lui, celui de la baronne.